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A RAÍZ AFECTUOSA (1972) Les Yeux d'Ulysse.p65 8 26/09/06, 09:27 LA RACINE AFFECTUEUSE (1972) (traduction d’Armand Guibert) Les Yeux d'Ulysse.p65 9 26/09/06, 09:27 A RAIZ AFECTUOSA Com os anos a pouco e pouco a raiz afectuosa penetrou no fundo da terra até chegar ao mais pequeno e mais antigo veio de lágrimas. UM RIO PARA OS INCAS Ressuscito os Incas: um rio saindo docemente da boca. APENAS COISAS Apenas coisas, forças elementares: O sangue que se dá, a pele que se ama, a passagem das nuvens, a voz de um amigo, 10 Les Yeux d'Ulysse.p65 10 26/09/06, 09:27 LA RACINE AFFECTUEUSE Avec les ans peu à peu la racine affectueuse a pénétré au fond de la terre jusqu’à atteindre à la plus menue et la plus ancienne veine de larmes. UN RUISSEAU POUR LES INCAS Je ressuscite les Incas : un ruisseau qui sort doucement de la bouche. RIEN QUE DES CHOSES Rien que des choses, forces élémentaires : Le sang que l’on donne, la peau que l’on aime, le passage des nuages, la voix d’un ami, 11 Les Yeux d'Ulysse.p65 11 26/09/06, 09:27 o escuro reboco do tempo, ele próprio lava corrupta, a única, única vida, o corpo, a carne, o futuro dos homens. TEMPESTADE Como no último dia do ódio de Deus, chove fogo e argila. Sob o rufar dos telhados, sós, à janela, esperam as crianças no claustro de seus olhos. DANTE Dante, meu astronauta do passado, poalho que busco como quem regressa e encontra o chão habitual – não o poeta, mas o homem que confiava no homem e a muitos rostos queria, a tantas bocas, a certas casas e seus recantos. Decerto que teve a alegria de levar as plantas a beber pelo solo e pelas folhas, viu comer os animais vorazmente e deles se aproximou como canavial junto às vinhas cerca do mar. Plantou uma, quantas árvores em chão molhado? 12 Les Yeux d'Ulysse.p65 12 26/09/06, 09:27 l’obscur crépi du temps, lui-même lave corrompue, l’unique vie, l’unique, le corps, la chair, le futur des hommes. TEMPÊTE Comme au dernier jour de la haine divine, il pleut du feu et de l’argile. Sous le plissement des toitures, seuls, à la fenêtre attendent les enfants dans le cloître de leurs yeux. DANTE Dante, mon astronaute du passé, fine poudre que je cherche comme l’homme de retour qui trouve le sol habituel – non le poète, mais l’homme qui se fiait en l’homme et qui aimait tant de visages, tant de bouches, et certaines maisons avec leurs recoins. À coup sûr il eut la joie d’amener les plantes à boire par le sol et par les feuilles, il vit manger les animaux voracement et d’eux il s’approcha comme les cannaies près des vignes à proximité de la mer. Il en planta une, combien de tiges en terrain mouillé ? 13 Les Yeux d'Ulysse.p65 13 26/09/06, 09:27 Entrando por suas grutas tépidas quantas mulheres desejou possuir? Que suores na mão, que fontes da vida o jovem e depois o homem grave não conheceu? O que levou com ele, quanto não disse, que desgostos, júbilos? ELEGIA PARA ANA ACHMATOVA Foi em 5 de Março, quase no fim deste Inverno. Com outra luz gostaria de ter entregue o corpo. Nevoeiro que nos montes se rasgava, despedaçado pelas árvores mais altas, herdara de Emily Dickinson o deslumbrante hálito sonâmbulo e de Safo o voo apaixonado. Safo, Emily Dickinson – duas vezes mortas. IN MEMORIAM Ao lado do corpo de meu Pai chorava esta pobre carne. E de repente chegou a tua e minha felicidade: A teu lado estou sorrindo a chamar-te, espero que regresses a casa, ansiosamente corro para a porta. 14 Les Yeux d'Ulysse.p65 14 26/09/06, 09:27 S’introduisant par leurs grottes tièdes que de femmes désira-t-il posséder ? Quelles sueurs dans la main, quelles sources de la vie l’adolescent, puis l’homme grave ne connut-il ? Qu’emporta-t-il avec lui, sans en rien dire, quels déboires, quels enchantements ? ÉLÉGIE POUR ANNA AKHMATOVA Ce fut le 5 mars, presque à la fin de cet Hiver. Sur un autre éclair elle aurait aimé livrer son corps. Brume qui dans les monts se déchirait, effilochée par les arbres les plus hauts, elle avait hérité d’Emily Dickinson l’éblouissante haleine somnambule, et de Sapho le vol passionné. Sapho, Emily Dickinson – mortes deux fois. IN MEMORIAM Auprès du corps de mon Père pleurait cette pauvre chair. Et subitement survint ton bonheur avec le mien : À tes côtés je suis, je t’appelle souriant, j’espère qu’à la maison tu retourneras, anxieusement je cours à la porte. 15 Les Yeux d'Ulysse.p65 15 26/09/06, 09:27 E ao colo sinto o teu calor, contigo passeio pela mão, pergunto, pergunto e tu respondes ocultando o fim da vida. Ver-te dormir, alegria igual à tua quando de noite tranquilo eu respirava. Tenho três anos e tu, Pai, és jovem, grande, senhor do mundo, deus docemente temido desde o início. Assim te amo agora sem lágrimas. Que deste modo teus netos um dia se recordem de mim, na tua, minha e deles pura ignorância da morte. AS ADOLESCENTES A pele mosqueada da maçã reineta, um ar vago e doce, feliz. Subitamente correm como rapazes, são a corda do arco que se dilata e a seta do corpo chega aos quinze anos quando abrem as ancas e amam como se fossem mães. 16 Les Yeux d'Ulysse.p65 16 26/09/06, 09:27 Dans tes bras je sens la chaleur, avec toi je me promène, la main dans la main, je demande, je demande et tu réponds en cachant la fin de la vie. Te voir dormir, joie égale à la tienne lorsque la nuit tranquille je respirais. J’ai trois ans et toi, Père, tu es jeune, grand, seigneur du monde, dieu doucement redouté depuis le commencement. Je t’aime ainsi maintenant sans pleurer. Que tes petits-enfants de même façon un jour se souviennent de moi, dans cette tienne et mienne et leur pure ignorance de la mort. LES ADOLESCENTES La peau tachetée de pomme reinette, un air vague et gentil, heureux. Subitement elles courent comme des garçons, elles sont la corde de l’arc qui se dilate et la flèche du corps fait mouche à quinze ans, quand elles ouvrent les hanches et qu’elles aiment comme des mères. 17 Les Yeux d'Ulysse.p65 17 26/09/06, 09:27