Mise en page 1 - Provence historique

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LES TESTAMENTS DE MICHEL PINHAN
Michel Pinhan est un riche bourgeois ayant occupé des fonctions
importantes au sein de la communauté arlésienne dans le courant du
XVe siècle. Ses testaments témoignent de sa fortune et des liens existant entre
les membres de sa famille. Certains sont conservés aux Archives
Départementales des Bouches-du-Rhône, dans une liasse cotée 22 H 178,
dans laquelle sont réunis aussi plusieurs feuillets concernant les frères prêcheurs. Les testaments sont contenus dans quatre cahiers de vingt folios cousus ensemble. Le premier cahier comporte un testament, le second un, le
troisième un plus le début d’un autre, au folio 12, qui se poursuit dans le quatrième. Ils mesurent 14,5 sur 20,5 centimètres et sont composés d’une feuille
papier avec des vergures et un filigrane représentant une main avec une
étoile. Des lignes horizontales ont été tracées par le scripteur ainsi qu’une
marge. Il y a plusieurs écritures différentes. Du XIIIe au XVIe siècle, en
Provence, l’usage du testament nuncupatif prédomine. Le testateur fait une
déclaration orale devant témoins ; cette dernière est ensuite retranscrite par
un notaire. Michel Pinhan a rédigé de sa main quatre copies ainsi qu’un codicille ; une autre a été faite par un notaire. Toutes sont en provençal. Trois
autres testaments, en latin, datés du 19 août 1439, du 23 mars 1442 et du 21
mai 1447 sont conservés dans les registres notariaux1. Le premier testament
olographe est daté du 3 mars 1446, le codicille du 26 janvier 1447 ; la seconde
version est du 4 mars 1448, la troisième du 7 janvier 1454, la quatrième du 31
janvier 1454. La copie du notaire a été faite le 15 septembre 1459. Sont joints
des reçus, en français ou en latin, de mains différentes, correspondant à des
legs qu’il a indiqués. Sera publiée ici, en annexe, la dernière version de la
main de Pinhan, la plus intéressante et la plus complète quant aux renseignements qu’il laisse transparaître sur sa vie, dont nous trouvons par ailleurs la
trace dans d’autres documents arlésiens.
1. Ms. 405 E 115, f° 70 ; 4055 E 118, f° 106v; 405 E 130 ; je dois ces renseignements, ainsi
que d’autres, à monsieur L. Stouff, que je remercie pour son aide. Je remercie aussi monsieur
N. Coulet pour toutes les remarques qu’il a eu l’amabilité de me faire.
Provence historique – Fascicule 214 – 2003
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SA VIE
Michel Pinhan vécut au XVe siècle. Probablement naquit-il à la fin du
. Nous ne savons rien de son enfance, de sa famille paternelle et maternelle, sinon que ses parents sont décédés au moment de la rédaction de ses
dernières volontés. Il apparaît dans les archives à partir de l’année 1431. Il est
en effet cité dans le CC 149, comptes trésoraires de 1431, f°71r. Le CC 17,
livre terrier de 1437, offre un état de ses biens : Pinhan, bourgeois appartenant au patriciat local, fait partie des plus grosses fortunes, ce que confirmeront ses legs successifs. Il déclare posséder six « hostals » dans la paroisse
Saint Julien, dont les taxes vont de 120 florins à 15 florins. De plus, deux personnes lui donnent un cens pour une demeure chacune. Il a aussi un jardin
(un « verger »), quatre vignes (deux en Crau, deux au Trébon), deux prés
(l’un au Plan du Bourg, l’autre aux Ségonaux), ainsi que plusieurs étals, dont
deux de boucherie. Cette fortune correspond à celle d’un marchand, la terre
occupant peu de place, sauf en ce qui concerne la vigne. Cette même année,
ainsi que le signale L. Stouff2 : « Le conseil prend des décisions pour lutter
contre les abus de tel ou tel groupe : en août 1437, le conseil ordonne à
Michel Pinhan de ne pas vendre ses chandelles plus de douze deniers la
livre ». C’est en effet un marchand, un « revendayre », qui eut pour patron
Pierre d’Antan. Nous savons par ailleurs qu’il vendait des brocs et des
poêles. Toujours selon Louis Stouff3, « en mai 1438, le garde (des) salines (de
la Vernède) interdit aux charretiers de Michel Pinhan de prendre le sel qu’il
a acheté à un maître des salines ». En 1438, il est membre de la confrérie Saint
Esprit de la Cité. En 1438 et 1439, il est pontanier, peseur en 1440, trésorier
de la communauté arlésienne en 1442. Il s’agit d’une période difficile pour
Arles, car les routiers sont proches de la Camargue, et des mesures doivent
être prises afin qu’ils n’entrent pas dans la région. Sont alors syndics
Honorat Romieu, Georges Isnart, Antoine Basan, Raynaut Pelardit. À un
moment, il est remplacé dans sa charge par son fils Antoine, car il est absent
de la ville. Nous pouvons lire en effet dans le compte trésoraire de 1442, (CC
161 f°4v) : « a receuput lodich jorn, presens los nobles Honorat Romieu,
Jorge Isnart e messier Antoni Basan, consindegues, Anthonet Pinhan, filh
deldich Miquel Pinhan en absencia de son payre qual era foras d’esta
villa… ». Nous sommes le 7 octobre. Or, le 25 juin, (f°10r), il est signalé
qu’ : « a pagat lodich thesaurier e per el Antoni son filh audich messier
Antoni Grimaut en nom d’el e deldich messier Peyre per lur enbayssada e de
comandament dels quatre senhors sindegues presens des florins. » Entre ces
deux dates, Anthoni a aussi suppléé son père dans cette fonction. A la fin du
mois de juin, c’est apparemment Michel Pinhan qui exerce à nouveau la
charge. En tant que trésorier, il doit recueillir le « prêt » demandé pour subXIVe
1. 2. L. STOUFF, Arles à la fin du Moyen-Age, Aix-en-Provence, 1986, p. 299.
3. L. STOUFF, op. cit., p. 555, n. 165.
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venir aux frais occasionnés à la ville par la guerre contre les Catalans. En
1443, il va à Fourques pour « portar lo blat an Gilhem Raynaud ; an despendut en pan, vin e carn tres gros ». En 1449, il est vérificateur, puis syndic
d’Arles en 1451. De plus, il a été conseiller pour les prud’hommes en 1432,
1440, 1441, 1442, 1443, 1444, 1445, 1446, 1449, 1450.
D’autres Pinhan sont signalés, par exemple dans le II E 36, comptes trésoraires de l’Hôpital de Saint Esprit du Bourg de 1439-1506, f°7v : « L’an mil
IIIC.LXXIX et a primo de mars, compret Anthoni Folco rector de l’hospital
de Sant Esperit del Borc de Miquel Rogier alias Pinhan XVIII gros censals
sus una part de son hostal… ». De même, en 1485, un Michel Pinhan « fes
netegar lo portal de la Cavallarie ». De qui s’agit-il ? D’autres sources indiquent qu’au XVe siècle, un marchand, Michel Pignan, possède une maison
(rue Réattu – rue de Grille – au planet des quatre coins du Pignan),
« confrontant trois rues publiques et la maison des hoirs de Pierre de
Leguis ». Cent ans plus tard, on trouve le logis des trois Pignons. Ainsi que
l’indique B. Guillemain4, le testament « peut être interrogé sur la famille, sur
la fortune, sur les relations et il se présente alors comme un indicateur majeur
de l’histoire sociale ». Lorsqu’il est confirmé par d’autres sources, il devient
un élément parmi d’autres dont l’exploitation nous permet de mieux cerner
le testateur. Le Michel Pinhan qui transparaît, malgré des contradictions, a
été un acteur relativement important de la vie politique et sociale d’Arles ; ce
qu’il nous révèle de lui dans ses testaments va plus ou moins le confirmer.
Mais pour quelles raisons a-t-il éprouvé le besoin de revenir plusieurs
fois sur la rédaction de ses dernières volontés, même s’il n’est pas le seul dans
ce cas ? Y a-t-il eu alors une épidémie, une disette ou une guerre qui l’aient
poussé à le faire ? Les relations familiales étaient-elles assez mauvaises pour
que cela ait nécessité de régler au mieux la succession afin d’éviter tout conflit
ultérieur ? Certains membres ont été exclus de l’héritage, sauf le montant
minimum légal. Or, si nous nous en tenons à la peste, par exemple, nous
savons que deux années ont été terribles à Arles : 1398, 1484. Entre ces deux
dates, des poussées ont été constatées, notamment en 1439, 1442-43, 1450-51,
années les plus proches de nos testaments. Il y en a eu d’autres, bien sûr.
Remarquons cependant que Pinhan ne fait pas allusion à une épidémie quelconque, à une maladie, à la famine ou à la guerre. Rien ne laisse présager que
là est la raison qui le pousse à tester. Par contre, les changements, superficiels
ou importants, qui interviennent, laissent plutôt envisager une mésentente
familiale, puisqu’il va jusqu’à déshériter ses petits-enfants. L’omniprésence
de la mort, naturelle puisqu’il s’agit d’un testament, n’est pas due à une mortalité accrue alors.
4. M.-C. MARANDET, Le souci de l’au-delà : la pratique testamentaire dans la région toulousaine, introduction de B. GUILLEMAIN, Perpignan, 1998, t.1, p.5.
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SA FAMILLE
Il se maria deux fois, avec Bertrande N. d’abord, puis avec Delphine N.,
et eut huit enfants, dont l’un décéda probablement en bas âge. Ses parents
sont morts. Il a un frère, Pierre5, et un neveu, Jacques Roger, originaire de
Lunel, à qui il fait un legs en 14396. Il a aussi une soeur, Alice Pinhan, de
Bernis, situé dans le Gard, canton de Vauvert, qui a, au moins, un fils. Il ne
parle jamais de son mari7. Il teste en sa faveur, mais il ne veut pas que ce qu’il
lui concède revienne ensuite à son neveu. De plus, seuls deux de ses enfants,
Antoinette et Pierre, sont décédés. Antoinette était déjà adulte, puisque
mariée et mère d’un fils ; en 1446 et 1448, elle fait encore partie des légataires,
mais plus en 1454. Peyron est probablement mort en bas âge ; il n’apparaît
pas en 1446, et M. Pinhan prie pour son âme dès 1448. La mortalité infantile
est donc très faible dans cette famille, en comparaison de celle de Bertran
Boysset par exemple, Arlésien bien connu8. Parce que les Pinhan, famille
aisée, sont plus protégés ? Très peu de prénoms reviennent. Aucun de ses
enfants ne porte le sien. Par contre, sa petite-fille, Alice, a le même que sa
sœur.
Antoine, le fils aîné, né du premier lit, est l’héritier universel. Adulte au
moment de la rédaction des testaments, il est marié et père de quatre enfants.
Il remplace son père pendant sa vie, nous l’avons déjà vu, et continuera à le
faire après sa mort. Il a probablement le même métier, de même que l’un de
ses fils. Dans le testament du 15 septembre 1459, le prénom de sa femme n’est
plus Gasens, mais Cécile. Il hérite des biens meubles et immeubles, mais
aussi de la responsabilité de pourvoir à la vie des membres de sa famille survivant à son père, conformément aux habitudes. Ainsi que le signale
D. Lett9, « Au cours des XIIe et XIIIe siècles, pour éviter le morcellement du
patrimoine, le fils aîné est très souvent l’héritier privilégié… À la mort de ses
parents, l’aîné, s’il est majeur, a des droits et des devoirs envers ses frères et
soeurs mineurs… ». Pinhan évite ainsi, en grande partie, l’émiettement de
son patrimoine, car, malgré les nombreux legs assurant pendant un certain
5. Dans le livre terrier de 1425 à 1431, il possède un manifest commun avec ce dernier. Sa
belle-soeur, Raymonde, veuve de Pierre, apparaît dans le livre des criées de 1436-1437 (candelariorum cepi).
6. On le rencontre dans le capage de 1438. Il a laissé deux testaments : 405 E 120, f° 110,
du 4 février 1443 ; 405 E 13O, f° 170, du 20 mars 1448. « Il est parfois qualifié de Jacobus Rogerii
alias Pinhan. En 1443, il demande à être enseveli dans le cimetière Saint-Pierre des Alyscamps
dans la tombe de Peyron Pinhan, son cousin, fils de Michel Pinhan, avunculi sui », me signale
L. Stouff.
7. Dans le testament de 1442, 405 E 118, elle est veuve de Guillaume Moleyrani de Bernis.
8. Cf. M. R. BONNET, « La chronique de Bertran Boysset : un récit en langue vernaculaire », dans Bertran Boysset et ses manuscrits. Etudes. Editions de textes. La France Latine,
n° 125, 1997, p. 243-284. L. STOUFF, « Un Arlésien de la fin du Moyen Age : Bertran Boysset
(1350-1415) », dans Etudes Vauclusiennes, n°24-25, juillet- décembre 1980, janvier-juin 1981,
p. 57-60.
9. D. LETT, L’enfant des miracles. Enfance et société au Moyen Age (XIIe-XIIIe siècles),
1997, p.182.
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temps l’existence des membres de sa famille et ceux qu’il fait par ailleurs, la
plus grande partie de sa fortune est confiée au fils aîné.
Gabriel, fils du second lit, est plus connu. Dans le testament du 3 mars
1446, il a entre sept et huit ans10. Dans le cas du décès du père, Antoine doit
le loger et le nourrir jusqu’à ce qu’il ait dix-huit ans, et lui permettre d’aller
à l’école jusqu’à quinze ans. A ce moment-là, si Gabriel veut continuer ses
études, ce que souhaite son père, Antoine devra lui fournir, en plus, les livres
nécessaires pendant les trois ans suivants. Sinon, il devra le placer dans une
boutique pour apprendre un métier. Si Pinhan se conforme à l’usage en cours
à Arles à cette époque, nous pouvons estimer que l’entrée en apprentissage
se faisait à quinze ans pour les garçons (à Orléans, elle se situait aux alentours
de dix-huit ans, dans le Poitou et en Auvergne, en général vers seize ou dixhuit ans, dans le pays valencien, entre neuf et douze ans11). Ainsi que le
signale D. Lett12, « les hommes et les femmes du Moyen Age attachent une
grande importance à l’éducation des enfants… Les statuts synodaux rappellent ce devoir élémentaire. Ceux d’Angers demandent aux prêtres d’avertir
souvent leurs paroissiens de faire instruire soigneusement leurs fils et de les
inciter à fréquenter assidûment les écoles car, précise le texte, les illettrés ne
peuvent être admis aux bénéfices ecclésiastiques ». Or c’est bien ce que souhaite Pinhan, qui donne plusieurs indications quant aux legs à faire à Gabriel,
évolutifs en fonction du fait que ce dernier aura, on non, un prieuré ou un
bénéfice. Son existence est donc assurée. Mais il a eu, apparemment, le choix,
même si nous pouvons supposer une certaine pression parentale ! Toujours
selon D. Lett13, « ce sont les cadets qui sont envoyés dans les monastères ou
voués à la vie cléricale ; l’aîné est porteur d’un espoir économique et politique ; il permet la postérité terrestre de la famille tandis que le cadet est
l’élément spirituel qui en assure la postérité dans l’au-delà ». Les testaments
de Pinhan, qui prend toutes les précautions de son vivant afin d’assurer son
avenir, s’inscrivent donc bien dans les habitudes mentales et comportementales du XVe siècle. Mais les legs évoluent en même temps que la situation de
Gabriel, et les testaments font apparaître des différences. Celui du 4 mars
1448 révèle que Pinhan espère que Gabriel sera « capelan ». Celui du 7 janvier 1454 nous apprend qu’il est « reseuput monge en lo venerable monestie
de Sant Peyre de Montmaio ». Celui du 31 janvier 1454, qui confirme cela,
indique cependant qu’il est toujours « a l’estudi ». A travers les donations
faites à Gabriel se dessine aussi la maison dans laquelle vit Pinhan, ainsi que
les étals dont il est propriétaire. Gabriel est probablement celui qui nous
apprend le plus de choses sur la famille et sur certaines habitudes et modes
de vie.
10. Dans le testament de 1442, 405 E 118, il a plus de deux ans et moins de trois.
11. D. LETT, op.cit., p. 282.
12. D. LETT, op.cit., p. 149.
13. D. LETT, op.cit., p. 290.
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D’autres enfants sont mentionnés, dont Antoinette, la fille aînée, issue
de son premier mariage, comme Antoine. Le frère et la soeur ont le même
prénom, sous leur forme masculine et féminine. Elle est mariée à Jacques
Liautaut, de Tarascon, dont elle a un fils (le seul mentionné), Bertrand. Dans
le II E 37, comptes trésoraires de l’Hôpital du Saint Esprit du Bourg de 14791506, f°84r, apparaît une « Thoneta Pinhana, prioressa de l’hospital ». Il est
difficile de supposer qu’il s’agit de la même personne, Pinhan demandant de
prier « per l’arma de ma fila Toneta » dans le testament du 7 janvier 1454 et
dans celui du 4 mars 1454. Dans celui de 1448, elle est prénommée Toneta.
Or, le diminutif ne peut se rapporter à l’âge, puisqu’elle mariée et mère de
famille. Peut-être faut-il voir là une marque d’affection de la part d’un père
soucieux de l’avenir de sa fille. Toujours dans celui de 1448, son fils, Bertrand
Liautaut, est héritier. Pinhan le désigne comme le fils de « ma fila Toneta
mole que era de Iaume Liautaut ». L’usage de l’imparfait confirme ici le décès
d’Antoinette. Elle n’est plus citée parmi les légataires dans les deux derniers
testaments. De son vivant, elle bénéficie d’un legs supplémentaire de dix florins par rapport à ses autres soeurs.
Catherine est la première fille de son second mariage. Dans le dernier
testament, il est signalé qu’elle est mariée à Elzias Gondart (probablement
boucher). Elle perçoit deux-cent-cinquante florins de dot, répartis comme
suit : cinquante florins lui sont donnés le jour du mariage, vingt-cinq par an
ensuite. De plus, elle conserve ses vêtements et ses bijoux. Si elle devient
veuve, elle pourra résider, temporairement, dans la demeure familiale occupée par Antoine, aux dépens de ce dernier. Ses autres soeurs ont la même
chose. Cependant, dans la copie du 15 septembre 1459, Pinhan leur octroie
cent florins supplémentaires. En bon père de famille, il dote ses filles le jour
de leur mariage. Selon N. Jornet14, grâce au testament se dessine « la progressive correspondance de l’héritage – légitime de la fille avec sa dot lors du
mariage, ou en tout cas l’anticipation de son héritage – ou une partie – à
l’occasion de son mariage ».
Douce, sa seconde fille, a épousé Antoine Villasse (deux A.Villasse sont
répertoriés, un fustier, un notaire). Ces deux filles sont mentionnées dans
toutes les copies.
A partir de celle du 4 mars 1448, apparaît Jeanne, ou Jeannette. Elle n’est
toujours pas mariée dans cette dernière. Remarquons par ailleurs l’usage du
diminutif dans le prénom. Traduit-il son jeune âge, ou s’agit-il d’un suffixe
affectueux ? Après le décès du père, les enfants non encore majeurs seront
placés dans une famille, la leur, puisque le demi-frère aîné est chargé
d’assurer leur éducation et doit les prendre en charge. Cette « famille recomposée » est malgré tout proche, et donc protectrice, du moins pouvons-nous
14. N. JORNET, « Les femmes catalanes à travers leurs testaments (938-1131) » ; La femme
dans l’histoire et la société méridionale ; 66e congrès de la Fédération Historique du Languedoc
Roussillon, 1994, p.94.
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le supposer. Pinhan tente d’éviter la dispersion des siens puisqu’Antoine
devient à son tour le facteur de stabilité en se substituant en tout à son père,
rôle dont ce dernier le charge.
Cinq petits-enfants sont cités. D’abord, les quatre enfants d’Antoine :
Alice, Sileta, ses « felezenas », Jean, Etienne, ses « felezenes ». Un Etienne
Pinhan est mentionné dans le CC 520, recueil de pièces justificatives des
comptes des années 1478, 1485, 1486, 1487, 1489 et 1490, f°18r. S’agit-il de ce
dernier ? Or si, dans le premier, Pinhan leur lègue cent florins et cinquante
florins, dans le codicille, il ne leur laisse que cinq florins, puis ils disparaissent des legs. Nous pouvons supposer qu’ils sont toujours vivants, puisqu’ils
ne sont pas cités dans les prières pour le repos de leur âme. Il faut donc en
déduire qu’un événement, assez grave, s’est produit entre eux pour qu’il les
raye de son testament. D’après N. Jornet15, ce dernier « peut être également
un facteur de rupture par l’exclusion de certains membres ». Mais le droit
provençal veut que tous les enfants vivants reçoivent quelque chose. Ce procédé s’applique aux petits-enfants. Quant à Bertrand Liautaut, Pinhan teste
en sa faveur dans la version du 7 janvier 1454 et dans celle du 15 septembre
1459. Il lui laisse vingt florins, cinq qu’il recevra le jour de ses vingt-cinq ans,
puis cinq par an pendant quatre ans. Par contre, si les quatre premiers sont
qualifiés de « felezenes », il n’en est pas de même pour Bertrand.
Sa sœur est elle aussi constamment mentionnée dans les six documents,
sous le patronyme paternel. Elle est, parfois, dite « de Bernis », ou « abitan
de Bernis ». Dans la première version, il signale qu’elle a un héritier, à qui il
refuse tout droit sur ce qu’il lègue à sa soeur. Or, dès 1448, il prie pour son
âme, au même titre que pour celle des morts qui lui étaient chers. Ce nonobstant, elle ne disparaît pas des legs !
Enfin, nous avons des renseignements sur sa femme. Il a été marié deux
fois, d’abord avec Bertrande, la mère d’Antoine et d’Antoinette, puis avec
Delphine, la mère de ses autres enfants. Dans le testament du 4 mars 1454 il
est fait mention d’un fils de Delphine, Antoine Quodenau, probablement
issu d’un premier mariage. Il lui restitue sa dot. En tant que mari, il l’a perçue lors de son mariage, et elle doit être restituée si elle devient veuve. Il n’est
donc qu’un dépositaire, les parents assurant en quelque sorte l’avenir de leur
fille. La femme ne perd pas tous ses droits au moment de son mariage, et
l’époux n’est alors, selon l’expression juridique, que dominus usufructuarius.
Il ne touche finalement que les intérêts de la dot, puisque cette dernière est
restituée à la femme, et n’est pas impliquée dans la part d’héritage laissée aux
enfants. Mais, d’après J.-M. Carbasse16, « en pratique toutefois. le sort de la
veuve dépend entièrement des dispositions testamentaires de son mari, sauf
si elle a conservé quelques biens propres en dehors de sa dot ». Il semble
15. N. JORNET, op.cit., p.91.
16. J.- M. CARBASSE, « La condition de la femme mariée en Languedoc (XIIIe-XIVe
siècles) » ; Cahiers de Fanjeaux n°23, La femme dans la vie religieuse du Languedoc (XIIIe-XIVe
siècles), Toulouse, 1988, p. 99-112.
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donc que Pinhan se soit conformé à la réglementation en vigueur dans le
Midi. Delphine aura un usufruit sur les biens de son mari dans la mesure où
elle sera logée, nourrie et habillée. Il lui lègue de plus des bijoux, des meubles,
de la vaisselle. Il lui assure une rente, tant qu’elle ne se remariera pas. La restitution de la dot plus la rente viagère lui permettront ainsi de vivre jusqu’à
un éventuel remariage. Dans ce cas, l’autre mari la prenant en charge, la
réserve accordée par Pinhan n’aura plus de raison d’être. Cela implique peutêtre, indirectement, la rédaction d’un contrat de mariage, comme cela se faisait dans le Midi dès le XIIIe siècle, la dot en étant alors un élément très important. Et, ainsi que le signale J.-M. Carbasse17, « après la dissolution du
mariage, la logique « séparatiste » du régime dotal l’emportait et en bonne
règle la veuve devait récupérer sa dot et obtenir le paiement de l’augment de
dot à elle consenti par son mari dans le contrat de mariage ».
Or, à travers ces legs, transparaissent des rapports conflictuels avec son
beau-fils. En effet, dans la copie du 31 janvier 1454 et dans celle du 15 septembre 1459, Pinhan est amené à « prendre la parole » dans un discours
direct. Il s’adresse à son fils et à sa femme pour les exhorter à bien s’entendre :
ils doivent vivre en paix, car là où il y a paix et concorde, Dieu habite, et là
où il y a dispute et division, le démon habite… Il demande donc à Antoine
de ne pas mettre Delphine hors de la pièce où elle réside tant qu’elle portera
son nom. Mais, si nous observons bien le tableau mis en annexes, nous nous
rendons compte que le legs évolue au fil des années. La tension entre la bellemère et son beau-fils s’est probablement accrue, et Pinhan a alors senti le
besoin d’assurer financièrement l’avenir de sa seconde femme en lui laissant
une somme supplémentaire au cas où Antoine la chasserait de la maison.
Double intérêt, donc, d’abord à cause du style direct, ensuite par ce pan de
voile subrepticement levé sur une intimité familiale apparemment tendue !
Ainsi que le rappelle L. Stouff18, « l’un des buts du testament est d’éviter les
conflits entre le conjoint, les enfants, les parents, les héritiers possibles du
testateur… ». Il s’agit bien là d’une véritable transaction que Pinhan propose
à ses héritiers, qui perpétue ainsi la présence du chef de famille après la disparition de ce dernier, qui règle les problèmes à venir, préside encore à la destinée des siens, prolongeant alors son pouvoir au-delà de la mort. Il signale
en outre des « étrennes », consistant en une somme d’argent qui lui revient
de droit, non mentionnées dans les premières versions. Delphine devient
véritablement « propriétaire » d’un bien à la mort de son époux, parce que ce
dernier le confirme par écrit devant notaire. La femme dépend donc de la
bonne volonté du mari, en dernière instance. D’autres points, connus par
ailleurs, sont mis en évidence ici, concernant le sort de la femme et des filles.
17. J.- M. CARBASSE, op. cit., p.104.
18. L. STOUFF, « Mourir à Arles aux derniers siècles du Moyen Age » ; Mélanges
M. Vovelle, vol. aixois. Société, Mentalités, Cultures. France (XVe-XXe siècles), Aix-en-Provence,
1997, p.393-402.
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Il devait avoir des filleuls et des filleules autres que ses petits-enfants,
puisqu’au moins une est signalée dans l’un des reçus : Madeleine, fille de Jean
Clavel, de Fourques, à laquelle il donne dix florins en augment de dot lors de
son mariage avec Antoine Rivière.
Un autre élément intéressant concerne les enfants à venir. Si, à sa mort,
il a des enfants non encore nés au moment de la rédaction des testaments, ou
même au moment de son décès, ils seront héritiers au même titre que ceux
déjà cités. Ce souci d’assurer leur subsistance s’applique aussi aux enfants à
naître. Ainsi que l’explique D. Lett19, « In utero, l’enfant est, comme ses
frères et soeurs déjà nés, un héritier potentiel, car, on peut le lire dans Le
Conseil à un ami, de Pierre de Fontaine, « celui qui est encore à naître ne doit
pas être lésé ». » Un autre constat s’impose : comme la plupart des pères de
famille alors, Pinhan a le souci de protéger, ou de faire protéger, ses enfants
une fois orphelins, et le fils aîné se voit investi de la charge de maintenir la
cohésion et la subsistance de ce qui est, ou sera, une famille recomposée. Les
enfants seront ainsi accueillis dans celle du demi-frère, parent adoptif nourricier, ayant cependant un lien du sang avec ceux qu’il va élever. Ainsi
s’esquisse, à partir de ces testaments, une image, floue sans doute, mais néanmoins crédible, de cette famille arlésienne. Au-delà, nous avons un témoignage, conforme aux autres testaments, du souci des Arlésiens du XVe siècle
d’assurer le repos de leur âme, à travers des legs faits non plus aux membres
de leur famille, mais à ceux qui peuvent être des intercesseurs auprès de Dieu.
Se dessine aussi, même sommairement, la maison dans laquelle il vit,
signalée dans le livre terrier de 1437, coté CC 17. Située dans la paroisse Saint
Julien, elle est taxée cent vingt florins. Y est mentionnée une autre demeure,
« que se ten anbe aquel desus », « en lo plan de la serralhiera ». Il possède
d’autres biens immobiliers, cités eux-aussi. Cette demeure est léguée à son
fils aîné. Mais elle doit être assez grande puisque sa soeur, ses enfants, sa
femme, pourront y séjourner après sa mort. Or, Antoine est lui-même marié
et a des enfants. Quelques renseignements épars sont ajoutés. La chambre
qu’il occupe avec sa femme est en haut de l’escalier qui est à l’entrée, à côté
d’une autre pièce. Elle conservera le mobilier : le lit et la literie, une table,
deux bancs, deux petites tables, des coffres pour les vêtements. Quant à
Gabriel, lui aussi sera logé là lorsqu’il viendra à Arles, éventuellement avec
un compagnon ou un valet. Antoine devra alors tenir à sa disposition une
pièce dans laquelle se trouvent une croisée, une cheminée, des latrines, deux
lits. Pièce privée, relativement indépendante des autres, elle doit être bien
entretenue. La demeure familiale est vaste, à étage(s), et possède des parties
privées.
19. D. LETT, op. cit., p. 20.
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LA FORME DU TESTAMENT
L’autre intérêt des copies est leur forme, traditionnelle pour l’époque ;
elle correspond en général à l’étude des testaments arlésiens faite par
L. Stouff20. Je vais donc me contenter de rappeler ici quelques points.
Globalement, le plan est toujours le même : le testateur indique la date,
signale qu’il est sain de corps et d’esprit, introduit la formule traditionnelle
« en ce monde il n’y a pas de chose plus certaine que la mort et de plus incertaine que le jour et l’heure de cette dernière », que nous rencontrons dès le
XIVe siècle. Cette formule stéréotypée, présente dans pratiquement tous les
testaments, n’a probablement pas une grande portée chez Pinhan, qui rédige
ses dernières volontés afin qu’il n’y ait aucune contestation possible parmi
ses héritiers. Il recommande à Dieu son âme et celle des siens. Cela nous permet ainsi de connaître les décès survenus entre les diverses rédactions. Il
évoque aussi les saints, quelques différences apparaissant à travers les mentions successives21. Certains saints sont en effet omniprésents, d’autres non.
Faut-il voir là un besoin supplémentaire de protection ? Dieu doit les
envoyer au moment du trépas pour combattre le diable (c’est une armée
défensive) et l’empêcher d’entraîner l’âme du défunt. Cette invocation permet de préparer la mort, au cas où elle surviendrait inopinément.
Il désire être inhumé dans le cimetière des Alyscamps, là où sont enterrés les pauvres de l’hôpital du Saint Esprit de la Cité. Il fait preuve dans ce
cas d’humilité, puisqu’il ne choisit pas le cimetière ou le cloître de sa paroisse.
Rappelons ici l’une des caractéristiques de l’Arlésien médiéval, qui utilise
encore le cimetière extérieur, alors qu’à cette époque, les morts côtoient les
vivants. Mais les Alyscamps n’ont pas encore été abandonnés.
Suivent les legs, s’élevant à deux cents florins, conformes à ceux des
autres testaments, même si d’infimes différences apparaissent, dans l’ordre de
présentation d’abord. Dans les sommes léguées ensuite, certaines variant, ou
étant indiquées par un autre nom de monnaie. Pinhan témoigne à nouveau
du rang qu’il occupait et de sa richesse. Cette dernière est par ailleurs confirmée par les sommes allouées pour le luminaire, le nombre et le poids des
cierges étant précisés ; par exemple, en 1448, il prévoit l’achat de quatre
cierges d’une livre, de deux torches de trois livres. De plus, il évoque le repas
funéraire que doit offrir l’héritier aux amis venus l’accompagner jusqu’à sa
dernière demeure. Ce repas, pour lequel ne sont cependant cités que le pain
et le (meilleur) vin, est mentionné dans tous les testaments. Mais, dans celui
du 31 janvier 1454 et dans le dernier, il est aussi question de trente pauvres,
qui recevront en outre (en 1459), huit deniers. Les pauvres sont aussi béné20. L. STOUFF, « Les Provençaux et la mort dans les testaments (XIIIe sièclesiècles) »,Cahiers de Fanjeaux, La mort et l’au-delà en France méridionale (XIIe-XVe siècles),
n° 33, Toulouse, 1998, p. 199-222. « Mourir à Arles aux derniers siècles du Moyen Age », op.
cit., p.393-402.
21. Cf. annexes.
XVe
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ficiaires de legs et mentionnés dans tous les testaments, conformément à
l’analyse de J. Chiffoleau sur le « pauvre comme intercesseur symbolique » ;
toutes les copies confirment ce fait : Pinhan est soucieux de préserver sa vie
au-delà, et se préoccupe de ne négliger aucun de ceux, saints ou pauvres, susceptibles d’intercéder en sa faveur. De plus, des messes sont prévues, confortant le sentiment d’avoir assuré autant que faire se pouvait cet avenir hypothétique dont le vivant se préoccupe tant. Il use de tous les éléments connus,
conscient alors d’avoir fait tout ce qui était en son pouvoir, comme les autres
testateurs. Antoine doit faire savoir aux hôpitaux la mort de son père afin
que ces derniers distribuent l’argent à ceux qui en ont le plus besoin. La
famille est alors absente du testament, mais nous pouvons supposer qu’elle
était présente à l’enterrement, bien évidemment. Pinhan utilise toutes les
possibilités rencontrées chez les autres testateurs afin d’assurer la meilleure
protection possible. Anxieux de son salut, ses préoccupations religieuses
semblent aussi importantes que son souci de partager sa fortune. Le rituel
des obsèques est ordonné, avec une procession qui accompagne le corps
jusqu’à l’autel, cierges allumés, la croix le précédant. La messe est dite corps
présent. D’autres messes sont programmées, anticipant le « temps liturgique
postérieur au temps funéraire »22, ainsi que le rappelle N. Jornet.
Son église paroissiale, Saint Julien, est citée, ainsi que le couvent des
frères prêcheurs et celui des mineurs. Les dominicains sont établis à Arles
depuis 1231, près de la porte Agnel. En 1362, ils construisent près de Saint
Martin un nouveau couvent et une église. Quant aux franciscains, ils sont
arrivés à Arles avant 1248. En 1412, ils commencent la construction de leur
nouveau couvent, qui couvrait une partie du théâtre et allait jusqu’aux
Arènes. Ils furent très prospères au Moyen Age. Pinhan donne plus en faveur
des prêcheurs que des mineurs. D’autres établissements religieux sont évoqués : l’autel de Notre-Dame des carmes, l’oeuvre de cette église, l’autel des
frères de Saint Augustin, la chandelle de Saint Trophime. Trois des hôpitaux
arlésiens sont mentionnés : celui du Saint-Esprit de la Cité dit de l’Arc
Admirable, celui du Saint-Esprit du Bourg, celui de la Sainte-Trinité. Les
pauvres de Saint-Lazare ne sont pas oubliés, nous l’avons déjà vu, ainsi que
les pauvres filles à marier. En outre, dans deux des reçus insérés, il évoque
deux filles, Sansone, et Antoinette, fille de Guillaume Estève, porcher, pour
lesquelles il a donné quatre florins en dot. Pour la seconde, il signale même
le reçu fait par le marié au moment où sa femme a touché cette somme.
L’ordre de présentation des legs est conforme à ce qu’en dit L. Stouff23 : « Ces
legs sont énumérés selon un ordre toujours le même :
… – à la paroisse : au prieur, au chapelain – curé, au secondaire, aux différents clercs, puis aux « offices » de la paroisse…
22. N.JORNET, op. cit., p. 99.
23. L. STOUFF, « Mourir à Arles… », op. cit., p. 399.
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[liste type :] la chandelle de Saint-Trophime, le luminaire de SaintHonorat, l’oeuvre du Pont-de-Crau, les malades de Saint-Lazare, les quatre
hôpitaux, les quatre couvents de mendiants.
Selon les testateurs peuvent figurer les recluses, les ermites résidant dans
les églises des Alyscamps, les soeurs de Sainte-Claire, l’abbaye de SaintCésaire, une confrérie, le confesseur (sa présence est exceptionnelle), les
pauvres… » En fait, tout l’article peut s’appliquer, pratiquement, à ces testaments. Cependant, quelques modifications interviennent parfois. Par
exemple, le nombre de témoins n’est pas fixe : sept dans le premier, cinq dans
celui de 1448, huit dans celui du 31 janvier 145424. Le notaire change ; deux
sont cités : Bernard Pangon, Guillaume Raimond. Les exécuteurs testamentaires, de même, peuvent varier. Ils sont trois dans le premier et dans celui de
1454, cinq dans celui de 1448 et celui du 7 janvier 1454. Rappelons maintenant ce que L. Stouff écrivait 25: « L’acte est passé en présence de sept témoins
et se présente toujours selon le même modèle, les clauses se suivant dans un
ordre immuable : date, nom du testateur, formules initiales, élection de sépulture, legs « pro remedio anime », organisation des obsèques, legs divers,
éventuellement restitution de la dot et établissement d’une pension alimentaire pour la veuve, désignation du ou des héritiers universels, choix des exécuteurs testamentaires, lieu où l’acte est passé, liste des sept témoins et nom
du notaire. » Les copies de Pinhan respectent plus ou moins ce modèle. Il se
conforme donc à l’usage testamentaire, prenant soin aussi bien de son corps,
de son âme, que du devenir de sa femme et de ses enfants.
LA LANGUE DES TESTAMENTS
Ces textes présentent aussi d’autres intérêts pour l’Histoire, ou la
petite histoire, car Pinhan ne se contente pas d’une simple énumération de
legs. Il laisse transparaître, de manière implicite, des rapports humains,
notamment grâce aux incises et aux passages au style direct qui les émaillent.
Parfois, en marge, nous pouvons lire, à propos de l’une des personnes citées :
« es mort ». Cela paraît confirmer un fait : les formules toutes prêtes, stéréotypées, doivent exister, et il ne reste plus qu’à « combler les blancs » avec des
noms ou des chiffres. Sinon comment expliquer qu’en 1448 Bernard Vacha,
qui hérite de trois florins pour un trentain de messes, soit « décédé », alors
que rien n’est dit en 1446, et qu’il n’est plus signalé le 7 janvier 1454 ? Quant
à Alice, sa soeur, elle est systématiquement citée en tant qu’héritière, même
lorsqu’il prie pour son âme. Plus intéressants peut-être sont les brefs passages au style direct, lorsqu’il s’adresse à son fils et à sa seconde épouse afin
qu’ils vivent en bonne entente, ou lorsqu’il insinue à Gabriel qu’il aimerait
24. Cf. annexes.
25. L. STOUFF, « Mourir à Arles ... », op. cit., p. 394.
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bien qu’il devienne prêtre. Même si le discours est, là aussi, relativement stéréotypé, même si les recommandations obéissent à un certain mode de pensée, nous pouvons supposer qu’il reflète quelque peu la réalité de la vie en
commun, et que l’accord n’était pas aussi cordial que cela. Marchand aisé,
mari soucieux du confort de sa femme, du bien-être de ses enfants et de sa
soeur, il déshérite ses petits-enfants, ne veut pas que son neveu ait quelque
chose, hésite à un moment entre ses enfants (même ceux à venir) et l’église.
En effet, si Antoine meurt, tous les biens reviendront à Gabriel et aux autres
garçons, s’il y en a. Si tous les garçons décèdent, les filles hériteront. Et, le
7 janvier 1454, il est dit que si tous les enfants, filles comme garçons, périssent, ses biens reviendront à des couvents (pour trois cents florins). Les
petits-enfants sont là aussi ignorés ! Au-delà du discours plus ou moins officiel et d’une phraséologie caractéristique transparaît donc une sorte de parole
plus spontanée, grâce à laquelle Pinhan adresse directement des recommandations aux membres de sa famille.
Cette relative spontanéité est due aussi à la langue employée par Pinhan,
le provençal, et non le latin, qui correspond au discours officiel. Notre testateur peut se permettre quelques erreurs . Mais cette langue vernaculaire est
malgré tout très particulière ! Il signale avoir rédigé lui-même certaines versions, « de ma propria man ». Il n’est pas un scribe « officiel », respectueux
d’une norme en usage au moment où il écrit. Il présente un système original,
riche d’enseignements car révélateur de phénomènes particuliers, et
l’explication de M. Séguy26 : « Le scribe n’est pas lié par des règles orthographiques, procédant d’une tradition solidement établie et reflétant un état
périmé du phonétisme, discipline dont la contrainte réduit ou même annule
l’impulsion structurale » peut très bien lui être appliquée. Sa graphie est telle
que nous pouvons parfois la qualifier de « phonétique ». Pinhan, qui n’est
pas lié par des règles d’orthographe, est peut-être alors un témoin de l’oralité
de son temps, grâce à une systématisation de ce qui, isolé, serait considéré
comme une erreur !
Il use très peu des abréviations. Seuls quelques termes, très courants,
sont abrégés : « per, sen, liura, sol, denier gros, florin, com-, miech, Ihesus,
maystre, item ».
Son écriture, cursive, est assez personnelle. Il lui arrive de répéter un
mot ; parfois, il en barre un, parfois non. De temps en temps, il écrit un terme
dans l’interligne supérieure, dans la marge, ou même, mais assez rarement, à
la fin du paragraphe. Les folios, de petit format, sont assez aérés, la plupart
sont cancellés (parfois la barre passe sur une lettre, la rendant difficile à lire).
Le manuscrit a aussi subi les assauts traditionnels du temps, des vers, et n’est
pas toujours lisible. Pinhan ne met pas de majuscule aux noms propres, et a
tendance à détacher les syllabes d’un même mot.
26. M. SEGUY, « Essai sur l’état des palatales et de –d- romans en occitan du XIIe siècle » ;
Annales publiées par la Faculté des Lettres de Toulouse, Pallas I, Toulouse, 1954.
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Il ne bouleverse pas toutes les lois en vigueur, ses particularités intéressant surtout les consonnes. Le système vocalique est assez bien respecté et
n’offre pas de grandes différences avec les autres textes ; le –a féminin final est
par exemple maintenu. Les autres voyelles présentent en général un état
« classique ». Cependant, nous constatons dans quelques cas une certaine
hésitation : u/i/e : « pupil(l)itat / pipilitat / pepilitat ; pupila / pipila < pupillus ; matremoni / matrimoni ». Mais il s’agit là d’un vocabulaire notarial avec
des mots proches du latin. Il utilise aussi « mariage, maridage » (d’influence
française ?) aussi bien que « matrimoni »
: u/y : « bysin / busin ; mauvays / mayvays… ». –Y- ne remplace pas –i(comme dans la copie du notaire), mais –u-.
: o/e : « mosenor/ mosener ».
Le provençal médiéval témoigne d’une relative fidélité par rapport au
latin, alors que le français a poursuivi son évolution, sauf pour les termes de
formation savante. Les voyelles sont assez stables, quelle que soit leur origine. Elles ont peu évolué par rapport à d’autres parlers romans. Pinhan ne
propose pas de grandes différences. Les diphtongues, quant à elles, sont aussi
conformes : « permieyramen / permeyramen ; plerieyra ; entiera… ». Au
féminin, « endevenido, faredo, selebrado, eretie » font « endevenidoyra, faredoyra, selebradoyra, eretieyra ». Nous relevons les formes traditionnelles
« mayre, payre, frayre, maystre, ayre = ayse, trayre, laysa, noyri, vaysel », où
la palatalisation a normalement agi. L’orthodoxie de Pinhan quant aux
voyelles est assez manifeste. Par contre, son système consonantique est beaucoup plus « novateur » ! Toutes les consonnes ne sont pas concernées, et
nous ne verrons que celles qui offrent des différences. L’un des principaux
faits du vocalisme de la période primitive romane est l’amuïssement des
voyelles finales autres que –a. Cela a pour conséquence une fréquence très
grande des consonnes en finale de mot, qui évolueront selon leur nature, la
lettre qui les précède, et même celle qui les suivait, dans la mesure où, avant
sa disparition, elle a eu le temps d’influer sur son entourage, et aussi selon le
mot lui-même, oxyton, paroxyton ou proparoxyton. Certaines disparaissent
dès le latin vulgaire. Que deviennent les autres chez Pinhan ?
Certaines consonnes finales ne sont plus notées : « darie(r) ; eretie(r) ;
qula(r) ; admenistrado(r) ; quanta(r) ; meno(r) ; melho(r) ; particula(r) ;
molhe(r) ; pode(r) ; valo(r) ; capito(l) ». Le phénomène affecte essentiellement le –r final, ainsi que (mais dans un seul cas), -l (qui subit une autre
modification). Lorsqu’il s’agit d’un adjectif masculin terminé par -r, -r disparaît, (et réapparaît au féminin) : « endevenido > endevenidoyra… ». Les
infinitifs sont touchés par cette chute, qu’ils dépendent d’un autre verbe,
d’une préposition, ou qu’ils soient suivis d’un pronom complément : « segui ;
tene ; veni ; prega ; ese ; porta ; qurema ; sabe ; selebra ; manga ; marida ; esta ;
dormi ; plare ; quausa ; ensena ; ... » (mais nous avons une fois « vestir »).
Cette chute du –r (de l’infinitif comme des autres mots) a déjà été observée.
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Pour J. – Cl. Bouvier27, c’est un « phénomène médiéval ou post-médiéval ».
Selon A. Grafström28, « Le r final remontant à lat. rr reste presque partout,
alors que celui contenant lat. r tombe dans beaucoup de parlers…. La prédominance de la graphie r est probablement due à l’influence du latin, qui ne
connaît pas rr final ». Mais, paradoxalement, certains mots semblent conserver le –r : « amor ; sener (mais aussi souvent mosene) ». Pourquoi, alors, cette
permanence, alors qu’il n’était pas géminé à l’origine ? Peut-être s’entendaitil dans ce cas précis ? En effet, Pinhan, ne prononçant pas une lettre, la supprime. Cette disparition de –r est sûrement un fait avéré, car nous la rencontrons parfois, bien que rarement, dans d’autres documents. Cette quarence
quasi systématique observée chez Pinhan doit avoir une signification précise : il ne s’agit pas d’une méconnaissance, ou même d’une élimination intégrale de cette lettre. Cette tendance ne peut être que le reflet d’une réalité
phonique, que ne suit pas toujours la graphie.
Si Pinhan omet systématiquement -r final, il conserve le –t, surtout celui
des participes passés. Il a donc, apparemment, une intuition morphologique, t étant ressenti comme un fait syntaxique et non phonétique. Il le note pour
distinguer les participes passés des autres mots. Mais il le supprime après –n- :
« preren », ainsi que dans les adverbes en –ment. On a tendance à dire que la
chute des consonnes finales est due à l’influence du français, alors que ce phénomène pourrait être autochtone (fait corroboré par les autres textes, qui proposent aussi la chute de –t après –n-). Le mouvement décrit par H.
Coustenoble29 pour le provençal contemporain (« On remarque dans la prononciation familière des Arlésiens que les consonnes l,r,R,s,d,et b ne sont pas
toujours prononcées. On ne prononce pas toujours r final ; il tombe dans certains mots isolés, ou suivis d’un autre mot commençant par une consonne… d
tombe quelquefois devant R à l’intérieur d’un mot… ») est amorcé à l’époque
médiévale. Enfin, Pinhan supprime souvent –d devenu final : « fe ; gran ;... ».
D’autres cas de suppression de lettres apparaissent, qui ne concernent
plus ce phénomène. Certaines consonnes internes sont parfois « omises » :
« p(l)us ; io(r)n ; pau(b)ra ; co(n)sel ». Signalons le cas de « gleyra > greyra >
g(h)eyra ».
D’autres sont antéposées : « presona ; sebrantura ». Mais cette métathèse
n’a pas une grande signification, dans la mesure où les occurrences sont peu
nombreuses.
L’assimilation de rs > s et de ns > s est assez fréquente : « quos ; endevenidos ; soscesos ; sequtos ; partiqulas ; lu(r)s ». Lorsque nous ajoutons –s,
marque du pluriel, à un mot terminé par –r, ce dernier se transforme. Il y a
27. J.-Cl. BOUVIER, Les parlers provençaux de la Drôme ; Etude de géographie linguistique,
Paris, 1976, p. 279.
28. A. GRAFSTRÖM, Etude sur la graphie des plus anciennes chartes languedociennes avec
un essai d’interprétation phonétique ; Upsal, 1958, p. 162.
29. H. COUSTENOBLE, La phonétique du Provençal moderne en terre d’Arles, (Hertford)
1945, p. 124.
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assimilation, fait usuel alors. Pinhan fait subir le même sort à « co(r)s », mot
singulier. Selon A. Grafström30, « Il est possible que r ( < lat. r) soit faible
devant un s final et même qu’on l’écrive parfois sans le prononcer ». C’est
donc un procédé graphique presque traditionnel.
De même que certaines consonnes finales ne se prononçaient plus, de
même une autre transformation est attestée chez Pinhan, celle du son [z].
Dans la plupart des cas, le scribe le transcrit par –s- entre deux voyelles, ou
par –z-. Notre testateur propose une autre possibilité : -s- > -r- : « preren ;
quaura ; firel ; Blari ; plarera (subjonctif pour plasa) ; prerechados ; equleriasta ; gleyra ; reclura ; serviri ; farie ; proveri ; plare (= plaser) ; felere(na) ;
paurat ; fermera ; farie ; claurula ; mayron ; peraron ». Il semble aller jusqu’au
bout d’un phénomène, la sonorisation de la consonne sourde intervocalique
[s] > [z] > [r]. Il fait passer [z] prépalatal à [r] alvéolaire sonore. Par contre,
le son [s] est conservé et noté –s- : « mesa ; ynserta ; quontraversa ; espesialmen ; selebradoyra ; quausa (= chausser) ; grosa ; grasia ». Il distingue très
nettement « quaura » et « quausa » et n’emploie jamais l’un pour l’autre. Il
ne confond pas les deux sons, alors qu’il peut hésiter quant à la transcription
de [k], par exemple. A. Grafström31 note qu’il « a éventuellement existé une
variante dévibrée, témoin S. CABRARI ( < Caprasium) lod…, un r dévibré
étant très voisin de [z] ». B. Boysset offre quelques exemples de ce rhotacisme, mais moins fréquents.
Un autre emploi particulier est celui de –h-. Dans la plupart des documents, cette lettre a pour effet de transformer le son de la consonne précédente : -lh-, -nh- ont un son mouillé, -ch- équivaut à [k]. La disparition du
–h- latin a permis cet usage. Toujours d’après A. Grafström32, « Comme les
h latin et germanique s’étaient amuïs, on avait dans la lettre h un signe propre
à entrer dans diverses combinaisons pour représenter des sons nouveaux et
l’on a su s’en servir largement. » Chez Pinhan, son emploi est quelquefois
surprenant :
– Il ne l’écrit pas là où d’autres le mettent : « mosene(r) ; senor ; linage ;
senada ; mole » ; il ne peut donc représenter un son mouillé, et fonctionne
comme le signe d’une autre catégorie phonique. La mouillure peut être notée
par un double –l- : « ellos ; pupilla », ou par –li- : « molie ; pupilia ».
– Il l’utilise par contre d’une manière particulière. Nous pouvons
d’abord supposer qu’elle représente un son dur [k] ou [g] (nous ne tiendrons
pas compte de « que », pronom ou conjonction, du relatif « local… », ni de
« quan(t) ». Considérons d’abord le cas de [k] à l’initiale, ou précédé de a- :
qu + a, o = 81,6% ; c + a, o = 9,2% ; ch + a, o = 7,8% ; s + a, o = 1,2% (à un
moment, « se » = « que »). Voyons maintenant les mots où [k] à l’initiale est
suivi d’une consonne, l ou r : c + cons. + voy. = 36,9% ; qu + cons. + voy. =
30. A. GRAFSTRÖM, op. cit., p. 163.
31. A. GRAFSTRÖM, op. cit., p. 163.
32. A. GRAFSTRÖM, op. cit., p. 140.
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30,4% ; crh + voy. = 32,6%. [k] est aussi en position interne. Le nombre de
combinaisons dans lesquelles –h- entre, aussi bien à l’initiale qu’à l’intérieur
d’un mot, représente 65,88 % du chiffre total (les inégalités d’occurrences
pouvant aller de 1 à 123). De plus, un même mot peut être écrit de plusieurs
manières, par exemple le clerc : « quere ; querhe ; querge ; crergli ; qulerghe ». L’incertitude est assez importante. Toutes places confondues, les
formes les plus représentatives sont : qu = 49,1% ; ch = 25% ; c = 13,5%.
Nous trouvons de plus crh, jamais chr. A l’initiale, cr = 53,6%, crh = 39%,
qur = 7,2%. En position interne, seuls –cr- ou –crh- se rencontrent, pas
–qur-. Mais cela n’est valable que pour [k] + r. Lorsqu’il précède –l-, -h- n’est
pas post (ou pré)posé. Dans ce cas, nous avons –cl-, -qul-, ou même –ch- <
cl. Mais –h- n’est pas utilisé en contact avec –l-, comme avec les voyelles ou
–r-. Parfois, -h- représente le son lui-même, « diha, escrhiha, faha,... ». H.
Coustenoble constate, à propos de l’« arlésien » contemporain33 : « On
trouve la lettre h, à l’intérieur de certains mots, mais on ne la prononce pas.
Elle indique qu’il faut prononcer deux voyelles, et non pas une diphtongue.
Remarquer l’orthographe des mots rhodaniens, fiho, famiho, auriho… Dans
d’autres dialectes de la langue d’oc, on trouve : filho, familho, aurelho ». Mais
il s’agit ici d’un son mouillé, non d’un son dur. Les autres graphies sont plus
traditionnelles. Le –ch-, d’origine grecque, note parfois le même son que c et
qu, très répandus. Chez Pinhan, il transcrit aussi, dans deux cas, le son [s] :
« secha = cesser ; nesecharias ». Si –q- est bien ressenti comme la transcription de l’occlusive vélaire sourde [k], l’usage de –h- tend à prouver que cette
lettre avait la même fonction. Le même procédé se retrouve avec –g-, quelquefois renforcé par –h-. Q est appuyé par –u- (muet), même devant une
consonne. Lorsque –qu- est suivi de –u-, un seul est écrit. Pour A.
Grafström, les deux graphies c et qu rivalisent, la seconde étant plus étymologique. Mais Pinhan, ne se souciant pas d’étymologie, emploie les signes
qu’il connaît. La confusion provenait-elle alors de la prononciation, ou de
l’écriture ? Toujours est-il que, parmi toutes les formes à sa disposition, il use
même de –s- pour représenter [k] : « saura = caura ». Est-ce une erreur qui
se renouvelle ou le témoignage d’autre chose ? D’après R. Lafont34, h est un
« signe général de palatalisation », permettant de traduire l’évolution de c (+
a) en ch. Le plus étonnant, cependant, est la position de cette lettre chez
Pinhan, car nous observons une certaine cohérence, sinon une cohérence certaine, dans cette sorte d’anarchie qu’instaure sa présence. Sa place paraît fixée
d’une manière régulière. De plus, pourquoi la mettre après –r- dans le groupe
–crh- ?
La lettre g pose le même problème. Comment est-elle utilisée par
Pinhan ?
G à l’initiale : ga- = 64% ; gha- = 34% ; gua = 1,1%.
33. H. COUSTENOBLE, op. cit., p. 85.
34. R. LAFONT, Eléments de phonétique de l’occitan, Valdériès, 1983, p. 45.
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: gi-: jamais à l’initiale ; il y a toujours gui-, quel que soit le son :
« Guirome, Guili, guietar, Guimet ». Toutefois, la valeur phonique de cette
combinaison ne doit pas être la même pour tous les mots.
: go- : « govertat ; governa ; Gondart / Georgui, Georgi, Iorgui,
Gorgui ». A l’initiale, les j et g latins ont abouti au même résultat. Il est donc
possible que Pinhan ait confondu les deux et ait écrit g à la place de j (aussi
bien dans « gamay » que dans « Gorgui »).
: gu- : « Ghugla ». En général, g + u = [dj], par opposition à g + h = [g],
cf. par exemple « ghaguies ». Devant une voyelle, donc, plusieurs possibilités sont offertes. Pourquoi Pinhan a-t-il éprouvé le besoin d’adjoindre h à g
devant a et u ?
: gl- : « gloria ; Glaudo ; gleyra (54,5 %), greyra (3 %), gheyra (6 %), geyra
(36,3 %). » Là aussi, sérieuse hésitation dans la transcription de ce terme.
: gr- : « grasia, grhasia ; grosa, grhosa ; grhat ; gran ; Grasian ; Graset ;
Gregori ». De même que pour cr, h peut s’ajouter à ce bloc, et, là aussi, il ne
s’interpose pas entre ces deux lettres, mais après.
G en position interne : -h- est utilisé, mais pas dans tous les cas, et moins
souvent, semble-t-il, qu’en liaison avec –c-. (Il est surtout dans les deux
copies de 1454.) Par contre, comme avec –c-, et de même qu’à l’initiale, il est
placé après –cr-, et non entre les deux lettres.Parfois, il peut même remplacer –g-, comme avec –c-. Nous pourrions supposer que h vient renforcer g
pour indiquer une prononciation palatale sonore. Or, il peut aussi traduire
une sourde. La répartition était apparemment mieux appliquée quant à –c-.
Lorsque le scribe médiéval veut transcrire [ge], il écrit gue, [dje], ge. Pinhan
agit quelque peu différemment, et bouscule la tradition, notamment avec son
emploi de –u- ou de –h-. Le –u- paraît ne pas avoir la même connotation, et
être muet, comme après le –q-. De même, g + a peut équivaloir à [dja], [j]
(« gamays ; manga, maniar ; megansan, meiansan »). La présence de –h- est
moins constante, même si nous rencontrons une tendance identique à le placer dans la même position.
Il faut enfin signaler l’usage de « ung », l’article ayant ici une forme française.
Abordons maintenant le cas de –s-, qui n’est pas vraiment à la finale
absolue, mais précède immédiatement la dernière lettre, « borst » (compte
non tenu de la marque du pluriel). Le –s final, d’origine latine, est maintenu :
« quos < corpus ; quas < casum ; mars < martius ». En outre, les mots terminés par consonne ne sont pas automatiquement concernés. Enfin, parmi les
consonnes en cause, certaines n’entraînent pas ce phénomène. En fait, seuls
les termes terminés par –t sont touchés par l’antéposition du –s-. Dans la plupart des cas, Pinhan écrit –st au pluriel, non l’inverse : « ordenast ; pechast ;
escr(h)ist ; amist ; tost ; dost ; tengust ; reghonoghust ; enfrust ; enfanst ; genst ;
etc. » J. – Cl. Bouvier remarque35, à propos des parlers drômois du Sud ou
35. J. Cl. BOUVIER, op. cit., p. 293.
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du Nord, que « à la fin du XVe siècle, les occlusives dentales finales ne
devaient plus être prononcées après consonnes ou après voyelles ». « Dist »
et « fast » étaient donc, peut-être, entendus à Arles [di] et [fa]. Dans ce cas, il
devait en être de même pour les autres finales que nous venons de voir.
Plusieurs constatations s’imposent maintenant. Ce –s- ne concerne pas
uniquement les formes du pluriel, puisque nous le trouvons aussi au singulier (« Quavayrast, luost,... »). De plus, il est parfois absent au pluriel. Dans
certains cas, il est plus fréquent au singulier qu’au pluriel, lorsque –t est précédé de –a-, -e-, -i-, -n-, -r-. Seuls, -o- et –u- sont à mettre à part. Si nous faisons le compte des deux formes, nous obtenons : sing. –st = 62% ; -t = 37% ;
pl. –st = 84,5% ; -t = 15,4%.
Pinhan témoigne d’une tendance très nette à intercaler –s entre le –t final
et la lettre qui le précède. Peu importe, de même, la nature du mot. (Seul le
démonstratif « aquest » n’est pas pris en compte ici.) Le –t final n’est probablement plus prononcé à cette époque. Pinhan a besoin d’un signe pour
transcrire cela ; il choisit donc –s. Pourquoi ? La réponse est difficile à donner, car c’est le seul à utiliser ce procédé. D’ordinaire, lorsqu’il n’entend pas
une lettre, il la supprime. Pourquoi ce –s ici ? En mettre au singulier et au
pluriel pose un problème. Sans doute traduit-il l’amuïssement de cette
consonne finale, en monosyllabes aussi bien qu’en polysyllabes. Le –t implosif est noté dans l’écriture simplement.
Ces –t n’ont pas tous la même origine ni la même valeur. Certains proviennent de –t latins. D’autres du groupe –ct. J. Ronjat36 a rencontré ce s +
consonne, t et c. La consonne finale est prononcée dans certains endroits.
Dans d’autres, le traitement est identique à celui de –s- intérieur
devant consonne. Nous pouvons penser que –c et –t en fin de mots sont des
occlusives sourdes. Faut-il donc voir dans ce –t une graphie archaïsante qui
n’a aucune valeur phonétique ? -ct a d’ordinaire une résolution différente.
Selon J. Anglade37, « Le traitement de ce groupe en finale romane diffère suivant les dialectes. Tantôt c se vocalise et devient i (factum > fait, dictum >
dit). Tantôt le c se combine avec t pour former la consonne double ch (tch)
écrite quelquefois g,h ( factum > fach, dictum > dich) ». A. Grafström fait lui
aussi évoluer ct intervocalique en ch. La plupart des autres textes arlésiens
offrent en général les formes « fach, dich », au féminin « facha, dicha » ;
Pinhan n’a pas d’autres féminins. Le –st de ces deux mots fait –cha au féminin. Nous avons déjà vu que la finale du masculin, omise, réapparaissait au
féminin ; il en est de même ici. Différents mots et différents problèmes se
résolvent de la même manière et aboutissent au même résultat, mais
l’explication de leur développement n’est certainement pas identique.
Simplement nous trouvons-nous devant un fait accompli. Pinhan ne se pré36. J. RONJAT, Grammaire Istorique des Parlers Provençaux Modernes (sic) ; Montpellier,
1930, t.2, p. 281.
37. J. ANGLADE, Grammaire de l’Ancien Provençal, Paris, 1921, p. 165.
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occupe pas de phonétique. Il se contente de traduire, avec des moyens personnels, le langage qu’il parle et qu’il entend parler.
-l- associé à –a- se vocalise en –au- : « losquaus ; espitau ; esgaus ; auquna ;
universau; mondanau; espirituau; sauvamen ». Il en est de même pour –o- + l:
« lansou ; vou (une fois, = vol). » L vélaire devant consonne devenu u est un
phénomène général. Par contre, lorsque ce –l- était, en latin, une géminée
(aquellus par exemple), il reste intact, la vocalisation ne s’effectuant qu’avec
–l- simple à l’origine. Les autres documents témoignent de cette vocalisation,
mais d’une manière moins systématique ; elle n’apparaîtra vraiment que vers
la fin du XVe siècle – début du XVIe. Néanmoins, sa notation parcellaire
indique qu’elle existait, ce qui permet à H. Coustenoble38 de conclure :
« Nous pouvons seulement supposer qu’au cours du développement de la
langue, à travers les siècles, les habitants de la région d’Arles ont prononcé £
vélaire. Ceci expliquerait la transformation de l en u que l’on entend
aujourd’hui ». Pinhan est là pour témoigner que ce changement était déjà
amorcé au milieu du XVe siècle.
En général, dans les textes, l et n mouillés sont transcrits –lh-, -nh-.
À Arles, ce son est bien vivace à l’époque médiévale. Cependant, nous
l’avons vu, Pinhan utilise –h- dans un autre contexte. Comme il ne lui reste
aucun autre signe disponible, il écrit : « mole(r) ; fil ; fila ; milor ; sener ». Fautil voir là une dépalatalisation de –lh-, les autres textes témoignant d’une graphie plus traditionnelle ? Dans la mesure où nous avons aussi « molie », par
exemple, il est plus que probable que Pinhan n’a pas jugé utile d’insister sur
cette graphie.
La morphologie, beaucoup plus « classique », ne sera pas abordée dans
cet article, le plus intéressant étant ces particularités phonétiques dont
Pinhan fait preuve tout au long de ses copies. La conscience linguistique dont
il témoigne se révèle au détour de nombres de mots ou de formes, à travers,
aussi, ses incertitudes et ses tâtonnements. Plusieurs influences apparaissent,
celle de la langue « savante », notariale, proche du latin (« matremoni, matrimoni »), celle du français aussi. Il serait impensable que notre testateur ne
l’ait pas connu ; quelques reçus, en français, sont intercalés, parmi d’autres en
latin. Peut-être était-il bilingue ? Elle se fait sentir dans l’emploi de certains
termes (« maria(da)ge ; veduytat, veroage »), plutôt que dans l’orthographe
elle-même (permanence du –a final, du [ka-] initial, etc.). Il ne s’agit pas là de
diglossie, peut-être, mais les deux langues sont en contact permanent grâce
aux échanges commerciaux, à la place de la ville, à l’affluence de personnes
venant du Nord. Cette graphie, dans sa complexité et son apparente incohérence, débouche sur un système assez bien organisé. Cinq grands traits sont
à retenir : le rhotacisme, la vocalisation de –l- dans certaines conditions, la
présence de –h-, signe de palatalisation, la position de –s- en pénultième,
38. H. COUSTENOBLE, op. cit., p. 89.
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enfin la disparition de certaines consonnes finales, -r en particulier. Quelques
remarques annexes se greffent à cela : Pinhan note méthodiquement le e- prothétique devant s- (« espesial,... »), alors qu’il disparaît dans la copie du
notaire. Dans certains cas, il semble hésiter, témoignant ainsi que le procédé
n’est pas encore fixé. Dans d’autres cas, il est sûr de lui. Se posent alors
quelques questions : est-il le seul à se servir de cette méthode ? Si oui, pourquoi ? Qui la lui a suggérée ? Pourquoi les influences sont-elles plus pertinentes dans le choix des mots que dans la graphie ? Le système pronominal,
adverbial, etc., est conforme, plus ou moins, au modèle en vigueur. La syntaxe, qui traduit les relations linguistiques, est à peu près respectée.
En fait, nous avons probablement là l’un des textes les plus proches de
la langue parlée que nous puissions trouver. Cette « mimésis » de la parole à
laquelle nous assistons nous amène, non à une remise en question d’une
langue que nous connaissons grâce aux troubadours ou aux lettrés médiévaux, mais à un réajustement de certaines données pré-établies. Pinhan,
témoin privilégié, ou traducteur inconscient d’un langage oral en pleine
expansion, devient, par ses énigmes (ou ses erreurs ?), un représentant particulier d’une langue vivante. Ces documents présentent ainsi un double intérêt, pour l’historien d’abord, pour le linguiste ensuite. La vie du testateur,
qui n’est qu’esquissée, révèle malgré tout quelques aspects grâce aux remaniements, aux ratures, aux ajouts ou aux suppressions. La langue employée
propose une vision de ce qu’était le système à cette époque. Les tâtonnements deviennent alors des révélateurs d’une vie, d’une pensée, d’une personne enfin qui, ayant occupé une position importante dans sa ville, veut
mourir en chrétien, comme le souhaitent les hommes du XVe siècle. Même si
la vie de Pinhan n’a pas toujours été sans reproches, du moins ses testaments
sont-ils exemplaires en ce qu’ils peuvent dévoiler.
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ANNEXE 1 :
PIECE JUSTIFICATIVE
Testament de Michel Pinhan en date du 31 janvier 1454
(Archives Départementales des Bouches-du-Rhône 22 H 178, f° 52v.- 70r).
F°52v : Ihesus Maria.
E nom del Payre e del Fil e del Sant Esperit sie fast, amen. L’an de la encharnasion
de Nostre Senor Dieu que om quonta 1454, e a 31 de ienovie, sie manisfest a tost, prerens e endevenidos, que ieu, Miquel Pinhan, sant de mon quos e de ma pensa e en ma
bona salut estant, e mon chos non es coyghohat a neghuna malautie per la grasia de
Dieu, ieu quose dire que en aquest mon non a pus serta caura que la mort e pus enserta
que lo ion e la ora de aquela. Ieu39 vol tene l’orde que tot firel crhestian deu fayre. E vol
escriure de ma man propia mon dari testamen e ma dareyra volontat per so que entre
mos ereties e socsesos, degun debat ni quontraversa non y puoscha veni. E permieyramen rechomande la mieva arma quan del chos me partira a Nostre Senor Dieu e a la
sieva dona mayre la Verges Santa Marie e a mosenor sant Miquel arcayguil e a mosener
[f°53r] Peyre e a mosenon sant Pau e a mosene sant Gorgui e a mosener sant Blari e a
mosener sant Trofeme e a mosene sant Esteve e a mosene sant Iaume e a mosenor sant
Antoni e a madona santa Marie Macdalena e a madona santa Marta e a la verges santa
Quatarina e a tost lo sanst e las santas de Paradis, preghan-lus que preghon Nostre
Senor Dieu que li plasa que me trameta una partida de aquels sans e de aquelas santas
que ieu ay en devosion a mon trespasamen de aquest mon per ayutori que lo mayvys
demoni non me puoscha desebre, que la mieva arma vengha a sauvamen, amen.
Megansa la grasia de Nostre Senhor Dieu, quar en aquela ay gran esperansa.
Item prene del bens que a plaghut a Dieu que me a fast amenistrado la soma de
IIC florins.
[f°53v]40 Item per la salut de la mieva arma e per l’arma de lo mien sener payre
e de madona mayre e de Bertrana, moler estada mieva, e per l’arma de mon maystre
sen Peyre Dautan e de la sieva dona de moler, e per l’arma de mo fil Peyron e de ma
fila Toneta, e per l’arma de ma sore dona Alecsia, e per las armas de tost aquel e aquelas que ieu poyrie ese tenghut ni oblighas.
Item vol que los dosens florins se paghon en la maneysa sost escriha.
Item layse a III prerichados III frayre menou II florins, que sien tenghut de
porta mon chos a la sebantura.
Item ieu eleguise ma sebantura en lo sementeri de Sant Peyre de Alicshams aqui
on om sebelis los paures que moron a l’espitau de la Siutat.
Item vol que se quompron IIII siris del pes de miega liura [f°54r°] la pesa e non
otra per aquompana lo mien chos a la sebantura.
Item vole que se quompron II torchas del pes de III liuras la pesa, que on la
porte lavan la veraya crhos que aquompanara mon chos a la sebantura.
Item layse al privo de Sant Iolian, locau ieu soy son parochian, V sous.
Item layse al quapelan qurat III gros.
Item layse al seghodari de ladiha gleyra II gros.
Item al querhe que portara la crhos XII deniers.
Item a r’aquel que portara l’aygha senada IIII deniers.
Item a r’aquel que portaran los sires e las torchas a quada 1 II deniers.
39. Écrit en dessus.
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Item layse a quada ung del ufisis de ladicha gleyra I gros.
Item layse a quada quapelan que aquompanara mon chos a la sebantura e sera
en mas ensequias a quada ung II gros.
Item layse a quada religuios que aquompanara mon quos e sera en mas ensequias
que non sera quapelan XII deniers.
F°54v : Item layse a quada paure sie ome o femna que aquompanara mon quos
e sera en mas ensequias, a quada 1 VIII deniers.
Item ieu preghe a mos sequtos que o fason sabe als espitaus.
Item layse a XXX paures si ero que agheson aquompanat mon quos que lus sie
donat a dina al despens de mon eretie o a r’aquels que y serien.
Item vol e ordene que lo yon que mon chos sera sebelit e lo ion de del quanta,
se dighon XXX mesas se tan de quapelas se podon troba. E se non s’en trobava tan,
que se quomplis lendeman. E layse a quada quapelan II gros.
Item layse a maystre Aurias Bertomieu, de l’orde de Sant Domerghe, X florins.
E sie tenghut de pregha Dieu per la mieva arma e de tost aquel que ieu entende.
Item layse a frayre Antoni Martin, de l’orde de Sant Franses, X florins. Sie tenghut de prega per la mieva arma. E vol e ordene que totas aquestas laysas se pagho per
una ves tan solamen.
F°55r : Item layse a la taula del quoven del prerichados d’Arle XX florins.
Item layse a la taula del quoven del frayres menos V florins.40
Item layse a la taula del quoven del frayres de Sant Agustins II florins.
Item layse a la taula del quoven del frayres de Nostra Dona del Quarme VIII
florins. E que tost aquel frayres sien tenghut de pregha Dieu per la mieva arma e de
tost aquel que ieu entende.
Item layse a l’obra de la gheyra de Nostra Dona del Quarme V florins.
Item layse a l’espitau de la Siutat IIII lansos entro la soma de II florins.
Item layse a l’espitau de la Santa Trenitat IIII lansos entro la soma de II florins.
Item layse a l’espitau del Borst IIII lansous entro la soma de II florins.
F°55v : Item layse a l’espitau de Sant Lare VI lansous entro la soma de III florins.
Item layse a la quandela de Sant Trofeme I gros.
Item layse al Pont de Crhau 1 gros.
Item layse al resenin maystre en taulaguie, que es morghe de Sant Peyre de
Monmayo, que es aras aumornie, II florins miech. E que el sie tenghu de dire ung
trentenari de mesas per la mieva arma e de tost aquel que ieu entende.
Item layse a pauras filas a marida XXV florins. E vol que mon fil Antoni sie destrebuydo de dona losdist XXV florins la on el quonoysira so que se ven mes.
Item layse que se dighon XIIC mesas en las geyras que mos sechutos las vouran
fayre dire, e layse per quada mesa 1 gros.
Item vol e ordene que las laysas per me fachas de desus se paghon per una ves
tan solamen.
Item vol que la resta deldist IIC florins per me preres se meta en mesas selebradoyras. E se monta may [f°56r] las laysas de IIC florins, que se pren tan del bens de
que Dieu me a fast amenistrado entro que las somas de totas laysas sus de desus sien
paghadas.
40. « loschaus dosens florins se paghon en la maneyra que se ensec. Per la salut de la mieva
arma d de l’arma de ma moler Bertrana » : barré.
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Item vol e ordene que se se trobava que ieu aghes paghast las laysas de desus per
me fachas tot ou partida davan que aquest testamen fos41 fast o apres que mon eretie
non sie tenghut de torna pagha lasdichas laysas senon que de son bon grhat o voughes pagha.
Item vol e ordene que lo ion que mon chos se sebelira e lo ion del quanta, que
mos sequtos avon a durila ung vaysel del melo vin que els trobaran en lo ostau de
mon eretie, e que tost nostres “bons amis”42 que vouran veni mangha e beure en
l’ostau de mon eretie pan ni vin non lus quoste ren.
F°56v : Item layse a ma sore dona Aleysia Pinana C florins, loscaus vol que li sen
pahast XX florins per an en aquel quas que ela ne aurie mestie per nesesitat de sa presona. E se ne volie prendre per s’arma, que ela ne puoscha prendre entro la soma de
L florins. E non vol que ela puoscha laysa a son eretie la resta ni en autra part. E vol
e ordene que se el non avie pres los L florins per s’arma, o non ne avie guis avut per
los neghosis de sa presona en sa vida, aquel quas avenen, vol que tornon a mon eretie enfra escrhit.
Item may layse a ma sore dona Aleysi que quan li plarera de veni esta en l’ostau
de mon eretie, que ela y puoscha veni esta e demora aytan quan li plarera. E que mon
eretie sie tenghut a son despens de proveri la de manga e de beure, de vesti e de causa
e de totas las cauras que li seran nesesarias seghon la figentat de sa presona.
F°57r : Item reghonoyse a Daufina, moler mieva, LII florins lochaus ieu ay
reseuput del sien quoma esta notas reseupudas per las mans de maystre Peyre de
Lansast. E vol que li sin restutuys per las pagas que yeu los ay reseupust.
Item may layse a ladiha Daufina tost los vestires e yuels loscau a aras o auri al
tens de ma mort.
Item may layse a ladicha Daufina per los servires que ela me a fast e fa e non sesa
de fa la soma de C florins paghados XX florins per an per totas sas volontast faredoyras.
Item may layse a ladicha Daufina que se se trobava en quaysa o en quofre X o
XX pesas d’au o en autra part que ela o aghes mes, que li foson donadas per estrenas
o autramen ela los aghes aut, ieu las li done per amor de Dieu.
Item layse a ladicha Daufina una caysa aquela may amara de totas las caysa que
son en la quambra on el[a] a quostuma de yare a tota sa volontat.
F°57v : Item may layse a ladicha Daufina la setasion de sa pesona en l’ostau de
mon eretie. E vol que ela se proverida de manga, de beure, de vesti e de chausa e de
totas las chauras que li seran nesesarias seghon la figentat de sa presona al despens de
mon eretie aytan quan estara en mon nom.
Item may layse a ladicha Daufina la estasion de la quambra en que ela a verat de
dormi que es dechosta la sala al cap de l’eschalie de la yntrada de l’ostau. E se mon
eretie la guitava de ladicha quambra o l’an farie guita, o sostenie que om l’an guitas
per fayre dormi en autra part otra sa volontat, aquel quas avenen, ieu done a ladicha
Daufina CL florins paghados a sa permeyra requesta per tota sas volontast faredoyras. Quar ieu vos encharge que de ladicha quambra non la guites aytan quan en mon
nom estara.
F°58r : Item may “ieu vos”43 esrorte ne amoneste mon eretie e tost aquels desot
el que a ladicha Daudina porton amo e l’amon e la servison tan quant lus sera posyble.
41. « sie » : barré ; « fos » : écrit en dessus.
42. Écrit en dessus.
43. Écrit en dessus.
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E esrorte e amoneste ladicha Daufina que ela los ame e se esfose de fayre plare a tost
tant quan ela poyra. E quomande a las dos partidas aras per adonchas que sobre tot
estagon en pas, quar la on a pas e quonquordia, Dieu abita ; e la on a bregha e devererin, lo demoni abita. Gran defenen sia de esta en la quompanie de Dieu quontra esta
en la quompanie del diable. Prege vos que estaghas en pas, e tot ben vos vendra e espirituau e mondanau.
Item vol e ordene que se ladicha Daufina, moler mieva, non podie esta en pas en
mon eretie o en las genst desot el, e se volie departi d’els, aquel quas avenen, ieu layse
a ladicha Daufina las caura que se enseghon a sa vida e aytan quan estara en mon nom.
F°58v : E permeyramen li layse los enfrust de l’ostau de Alaysono, moler de
Roston Arsinbaut, locau ostau es en la parochia de Sant Iolian, e quonfronta en mon
ostau e tres partidas e en la quareyra plobicha e es davan l’ostau de maystre Peyre
Niquolau, delcau ostau ieu ay quomprat los us e enfrust per ung lont tems. E se ladicha Daufina vivie may que la quompra delsdist enfrust non montava, que mon eretie
li sie tengut de logha li lodist ostau o ung autre senblan a r’aquel e paga lo lo loguie
del sien propi de mon eretie.
Item may layse a ladicha Daufina ung44 liest garnit de ung matalas e de una
quouse de plume e de II soysins e II quobertas e de VIII lansous e de las quortinas
que son en lo liet en que ela a quostumat de dormi45.
Item vol que ela prengha la46 lo garnimen del liest en que ela a quostumat de
dormi47 per las cauras nomnadas desus. E se ela non volie lodist garnimen, que ela
puoscha cauri del garnimen del autre liest a son plare eyseptat lo garnimen del gran
liest. E vol que los lansous de desus sien bons e sufisiens.
F°59r : Item may layse a ladicha Daufina una taula e II taulayrons e II bant e III
toalas e II longeyras e II tesos e II plast e IIII48 esqudelas de estan en aureletas e IIII
en orles e II pecheyras e dos aygadeyras de estan bonas e sufisiens tot.
Item may layse a ladicha Daufina III botarel de II baraus la pesa e II de V baraus
la pesa per metre vin bon e sufisien.
Item may layse a ladicha Daufina II tasas d’argen del pes de VI onsas o entor la
pesa.
Item may layse a ladicha Daufina, moler mieva per sostenemen de sa vida
quada49 ant XX florins paghados en la maneyra que se ensec.
Item lo50 ion que ela se deseparara per esta a part, sin tengust mon eretie o los
siens de pagha-li X florins e del ion e VI meres51 meres venens antro X florins e quadau ant52 aytan [f°59v] quan ela vira, li sien tenghust de pagha XX florins per los
termes detras escrhist aytan quan ladicha Daufina en mon nom estara e en la viela
d’Arle abitasion fara.
Item vol e ordene que se ladicha Daufina rechulie en son ostau Antoni
Quodenau, fil de ladicha Daufina, per fayre quontuna demora amb’ela, aquel quas
44. Écrit en dessus.
45. « e vol que el puoscha chauri de pendra la rauba » : barré.
46. «la rau » : barré.
47. « lo » : barré.
48. « eschudela » : barré.
49. Écrit en dessus.
50. « yo » : barré.
51. « ven » : barré.
52. Écrit en dessus.
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avenen, ieu li tole e revoche que non li sien paghat los XX florins53 de desus. E quase
e nolle ladicha laysa del XX florins.
Item vol e ordene aprop la morst de ladicha Daufina54 o se non estava en mon
nom, que totas aquestas cauras que ieu li ay laysadas a55 a son alviri tornon aytans
quan serien a mon eretie enfa escrhit.
F°60r : Item layse a Ghabriel, fil mie quomun an Daufina moler mieva, morge
de Sant Peyre de Monmayo, quada an aytan quan estara a l’estudi XXV florins. E vol
que sin quada ant deliuras aldist Ghabrieu e paghat al ion de la festa de sant Miquel
archalguil.
Item vol erdede que quan lodist Ghabriel non estara a l’estudi, vol que non li sen
paghat los XXV florins.
Item may layse aldist Ghabriel quan sera fora de l’estudis quada ant una pension
sus tot mos bens de XV florins paghados quada ant a la festa de Paschas.
Item vol e ordene que se lodist Ghabriel avie benefisi o pension que valge pasat
XV florins deren la quada ant, aquel chas avenen, ieu56 li oste e revoche la pessio del
XV florins. E vol que d’aqui a V an non li sien paghat.
Item may layse aldist Ghabriel quan el venra en Arle sa estasion de una chambra que57 es en mon ostau e que iey ay verat de58 [f°60v] dormi, lacau quambra font
de maystre Esteve Ihoan, e se quonfronta en la quareyra de Trisamotas e en l’ostau
de dona Anneta deremparada de maystre Peyre de Lansast, en lachau quambra a una
fenestra crhorada e chameneyra e privada. E vol que mon eretie o los sien sien tenghut de tene garnida ladicha quambra de II liest59 garnist de matalas e de quouses e
quoysins e60 lansou e quobertas ben e sufisienmens. E vol que sien tenghut de dona
aldist Ghabriel e a son vaylet sa vida segon la figontat de sa presona aytan quan demorara en Arle.
Item vol e ordede que lodist Ghabriel non y demore a quotuni senon III o 4 ions
senon que lodist Gabriel fos malaute, quar aytan quan seri malaute, ieu vol que aya
l’aubire de la quambra. E en totas aquestas cauras que ieu ay laysat aldist Ghabriel61
ieu vol que el se tengha per pagha de tost mos bens. E se el y farie pus question ni
demanda, ieu li revoche totas las laysas que ieu li ay fachas. En ayso lo fant eretie partichula.
F°61r : Item layse a Quatarina e a Douseta e a Ioana, filas mievas quomunas an
Daufina moleler mieva, a quada una de lasdicha filas IICL florins a lus maridage. E
totas las raubas e yues que elas auran en aquela ora sien en creysimen de vercheyra,
que somara lus verayra de totas tres VIICL florins sensa raubas e yoels.
Item vol que ladicha soma se paghe en la maneyra que se ensec : al ion que se
selebrara lo matrimoni a quada una de lasdichas filas vol se sien deliuras e paghast L
florins, e de aquel ion en ung ant XXV florins, e quada an XXV florins entro que las
somas de lasdichas dost sien paghadas.
53. « per » : barré.
54. « que totas las » : barré.
55. « son » : barré.
56. « lo » : barré.
57. « ess » : barré.
58. « dor » : barré.
59. « guarn » : barré.
60. « quobe » : barré.
61. « ie » : barré.
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Item vol e ordene que mon eretie sie tenghut de noyri a son despens lasdichas
filas e de proveri las de manga e de beure e de vesti e sausa e de totas las cauras que
lus seran nesesarias segon la figentat de lus presonas entro que sien d’age de marida.
F°61v : Item vol e ordene que se lasdihas filas venien venien en estat de veroage,
lacau caura Dieu non vola, o auchuna de lasdichas filas, que elas agon retorn e puoschon veni en l’ostau de mon eretie. E que mon eretie o los sien sen dengust, aquel
quas avenen, de proveri lasdichas filas o fila a son despens de mange e de beure, de
vesti e de chausa e de totas las cauras que lus seran nesesarias seghon la fighentat de
lus presonas o presona. E en aquo las fanst ereteyras partiqulas.
Item vol e ordene que se lasdichas filas o fila de desus nomnadas morien en estamen de pulitat o autramen sensa ereties de lus chos e de lus liau matrimoni provenghut62, aquel quas avenen, sostutuyse en tot los bens63 de lasdichas filas o fila, vol que
torne a mon eretie o al siens enfra escrhit.
Item vol e ordene que se Daufina, moler mieva, enfantava davan ma mort
masche o masches o femel o femels, o aprop ma mort demorava grhosa e enfantava
masche o masches o femel o femels, aquel quas avenen, ieu layse a quada ung de aquel
enfans endevenidos, sen masche o femel, a quada ung la semblan laysa que ieu lase
quada una de mas filas desus nomnadas, so es asabe Quatarina, Douseta, Ioana, filas
mievas, e en aquo lo fan quada un eretie partiqula.
F°62r : Item vol e ordene que se aquel enfans endevenidos, masche o masches o
femel o femels, morie sensa eres de lus quos e de lus liau matrimoni provenghut, o
moriu en pepelitat o autramen, aquel quas avenen, vol e ordene que tost aquelas laysas que ieu lus ay fachas retonnon a mon eretie o al sien.
Item layse a Ghasens, moler de mon fils Antoni quomun an Bertrana permeyra
moler mieva, per los servires que ela64 me a fast e fa e non sesa de fa la soma de X florins.
E en tost mos autres bens fant mon eretie universau e de ma propia bocha lo
nomne Antoni Pinhan, fil mien quomun an Bertrana permeyra moler mieva.
Item vol e ordene que se Antoni Pinhan, fil mien eretie universau mien, morie
sensa ereties de son quos e de son liau matrimoni provenghut, aquel quas avenen,
lacau caura Dieu no vola, sustutuyse ma filas Quatarina e Douseta e Ioana o las sobre
vivens.
F°62v : Item65. Ayso es mon dari testamen e ma dareyra volontat. E vol que vala
per testamen o per vie de quodesil. E vole que se puoscha quoregui e esmenda e metre
caura o chauras per lo quonsel de ung savi o de dos, la sostansia del fast non mudada.
Quase e nulle tost los testamens que ieu ay gamay fast. E vol que aquest aya valor e
fermera.
Item vol e ordene mos sequto maystre Aurias Bertomieu de l’orde de Sant
Domerghe e frayre Antoni Martin, de l’orde de Sant Franses e mon quompayre
Grasian Bauma e mon quompayre Iaume Roguie, alcaus done pode e pousansa que
puson tan prendre del bens que ieu ay laysat a mon eretie entro que las somas de totas
laysas sien paghadas.
62. « que » : barré.
63. Écrit « benns », le second –n- étant barré.
64. « me fa » : barré.
65. «Item vol » : barré.
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Item es estat resitat e pres per nota per la man de maystre Bernat Panghon en lo
dormido del quoven del prerichados d’Arle, e son estast testimonis aquel que se enseghon : Ihoan Chareyra, maystre Guilimin Pelisie, Ihoan Quanat, Ihoan Plachart,
Peyre Gordi, Guilem Astre, Grasian Bauma, Antoni Bauma.
Ayso font fast l’an 1454 e a 14 del mes de febrie. Ita est Miquel Pinhan escrhit
de ma propia man.
F°63r : Item trobares atras en aquest preren libre a XIX quartas
l’aquomensamen de la pagha de mon testamen.
F°63v : Seghonse los leghat que ieu, Miquel Pinhan, ay fast en mon darie testamen quoma apa atras en aquest preren libre, que ay pres per la mieva arma IIC florins, e permieyramen.
Item vol se se quompron IIII siris del pes de miega liura la pesa e non otra per
aquompana mon chos a la sebantura.
Item vol que se quonpron II torchas del pes de III liuras la pesa e que se porton
davan la chros que aquompanara mon chos a la sebantura.
Item layse al privo de Sant Iolian, locau ieu son parochan, V sous.
Item al quapelan qurat III gros.
Item al seghondari II gros.
Item al qulerghe que portara la crhos XIII deniers.
Item a r’achel que portara l’aygha senada IIII deniers.
Item a r’aquel que portaran los sires e las torchas II deniers.
Item layse a quada ung del ufises de la gleyra de Sant Iolian I gros.
Item layse a chada quapelan que aquompanara mon chos e sera en mas ensequias
II gros.
F°64r : Item a quada religios que non aura selebrat mesa que sera en mas ensequias e aquompanara mon quos a la sebantura XII deniers.
Item a chada paura sie ome o femna que aquompanara mon chos, a chada ung
VIII deniers66.
Item preghe a mos sechutos que o fasan sabe al espitaus.
Item layse a XXX paures que vengho dina en l’ostau de mon eretie lo ion que
mon chos sera sebelit, e preghe a mos sechutos que fason que sien ben servist. E que
los encrarghon que prego Nostre Senor Dieu que aya mese de la mieva arma.
Item lo ion que mon quos sera sebelit67 e lo ion de mon quanta, que se dighon
XXX mesas. E layse per mesa II gros.
Item layse a maystre Aurias Bertomieu X florins e que sie tenghu de pregha
Dieu per la mieva arma.
Item layse al lesensiat frayre Antoni Martin de l’orde de Sant Franses X florins.
F°64v : Item a la taula del quoven del prerechados XX florins.
Item a la taula del frayre menos V florins.
Item a la taula del choven del frayres de Sant Agustin II florins.
Item a la taula del quoven de Nostra Dona dels Quarmes VIII florins.
Item a l’obra de la gleyra dels Quarmes V florins.
Item a l’espitau de la Siutat IIII lansous a la valor de II florins.
Item a l’espitau de la Santa Trenitat IIII lansous a la valor de II florins.
Item a l’espitau del Borst IIII lansous a la valor de III florins.
66. « e pregh » : barré.
67. « que » : barré.
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Item layse a l’espitau de Sant Lare VI lansous a la valor de III florins.
Item al Pont de Crau I gros.
Item al revenen maystre en la santa taulaguie aumornie de Monmayo II florins
miech per ung trentenari.
Item ay fait dire lodich trentenari al reveren payre maystre Pons de la Mota.
F°65r : Item a la quandela de Sant Trofeme I gros.
Item a pauras filas a marida XXV florins, e vol que Antoni fil mie los done ayla
on li senblara que sye ben mes.
Item layse per XIIC mesas, que mos sequtos las fason dire en las gleyras que se
vouran, per quada mesa I gros, que monton las XIIC mesas C florins.68
*
*
*
ANNEXE II
Manuscrits dans lesquels apparaît le nom de Pinhan :
Cote
CC 149
CC 153, f°4v°
CC 17
BB2
Ms. 220,
CC 161
CC 162
CC 163
Ms. 883, l.55
Ms. 883, l.123
CC 180, F°1v°
CC 520, l.18r°
Ms. 1566, p.3
II E 36, f°7v°
II E 37
CC 520, l. 31
Ms. 881, l.47
Dépôt
d’archives
A.C.A.
A.C.A.
A.C.A.
A.C.A.
M .A.
A.C.A.
A.C.A.
A.C.A.
M.A.
M.A.
A.C.A.
A.C.A.
M.A.
A.C.A.
A.C.A.
A.C.A.
M.A.
II B 12
A.C.A.
Date
Contenu
1431
1436
1437
1438
1442
1442
1442
1442
1447
1447
1451
1452 ? 1477
1472
1479
F°70v° : Peyre Pinhan
« a Peyre Pinhan per una holla peguiera »
Ses biens
Délibérations communales
Livre terrier
Livre terrier : M.P. est trésorier
Livre terrier
Livre terrier
Recettes et dépenses de G.Ayrola
Comptes trésoraires
Estève Pinhan
Anthoni Pinhan
Miquel Rogier al Pinhan
Thoneta Pinhana
1485
Dépenses
7-05-1490 Acte de vente par Antoine
Pinhan,marchand d’Arles, à Bertrand
Liautaud, de Tarascon, d’une maison à
Arles
1372 > 1517 Livre de reconnaissances de l’hôpital
d’Arles à l’almorna de St Esprit du
68. Les folios suivants sont des reçus en latin. A la dernière ligne du f°68r° est écrit : « Item
ay pagat he donat ha una filha per marida .1. florin », de la même écriture que celle du dernier
testament.
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ANNEXE III
Tableau généalogique
Bertrande
+
Antoine + Gasens
Michel Pinhan
Antoinette (morte avt. 1454) + Jaume Liautaut
Bertrand Liautaud
Alice
Sileta
Etienne
Jean
Delphine
Catherine + E. Gondart
+
Michel Pinhan
Douce + A.Villasse Gabriel (né
vers 1440)
Peyron
Jeanne (née entre
(né après 1446,
1446 et 1448)
avt. 1448)
*
*
*
ANNEXE IV
Dieu le Père
Jésus Christ
Le Saint Esprit
Sainte Marie
Tousles saints
Michel
Georges
Blaise
Trophime
M.-Madeleine
Marthe
Catherine
Barbe
Pierre
Jacques
André
Etienne
Gilles
Martin
Grégoire
Alexis
Antoine
Christophe
Paul
3.03.1446
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
4/03.1448
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
7.01.1454
x
x
31.01.1454
15.09.1459
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
x
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Les Saints invoqués (+ Dieu) :
ANNEXE V
Les legs faits dans les différents testaments.
legs
1446
1447
1448
1454
1454
Sa sœur Alice
100 fl.
+ logement
Même chose
Même chose
Même chose
Même chose
Sa femme Delphine 52 fl.(dot),
Même chose
100 fl ;
vêtements,
logement ou
100 fl. de plus
Même chose
+ X ou XII
pesas d’au
200 de plus
Même chose Même chose
+ une caisse
qu’en 1447
150 fl. de plus + 12 ou
13 écus
ou ducats
disposition
différentes
Antoinette
10 fl. + 250 fl Même chose
de dot
+ logement
Même chose
(décédée)
Même chose ;
son fils : 20 fl.
à partir de
ses 25 ans
Catherine
250 fl.
+ vêtements
+ bijoux
+ logement
Même chose
Même chose
Même chose
Même chose
+ 100 fl.
Douce
250 fl.
+ vêtements
+ bijoux
+ logement
Même chose
Même chose
Même chose
Même chose
+ 50 fl.
250 fl.
+ vêtements
+ bijoux
+ logement
Même chose
Même chose
Même chose
Même chose
Usufruit
de 2 maisons
+ étal de
boucherie (ou
20 fl. par an)
+ logement
25 fl. pour
ses études
+ 15 fl.
+ logement
50 fl.
Jeanne
Gabriel
500 fl.
+ logement
+ 500 fl.
s’il n’y a pas
d’autre fils
Fille à naître
Cf. les autres Même chose
Même chose
Même chose
Même chose
Garçon à naître
Cf. Gabriel
Même chose
Même chose
Même chose
Même chose
Petits-fils,
Petites-filles
50 fl.,
100 fl.,
5 fl.,
5 fl.,
Gasens
10 fl.
Même chose
Même chose
Même chose
Cecile :
même chose
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LI
(Ses armoiries, une pigne sur fond jaune, sont dessinées dans le ms. 246, f° 51, de la
Médiathèque d'Arles, en bas d'une page avec celles de Jacques de Reynaud, Jacques
de Brunet, Bernard Textores ; elle correspond à la "18e année du règne du bon Roy
René", 1451).

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