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ETUDES SUR LE LOGEMENT AU BRESIL
Licia VALLADARES
Les études sur le logement au Brésil ont commencé dans les années 60
mais c’est surtout dans les années 70 qu’elles ont constitué un domaine de
recherches à statut propre. C’est un champ relativement interdisciplinaire où
notamment des sociologues, des architectes et plus récemment des historiens
et des urbanistes “cohabitent”.
La production regroupe non seulement un nombre considérable de
livres, d’articles, de rapports de recherche mais surtout des thèses de
mestrado (DEA) et de doctorat dont plusieurs ont été publiées au Brésil. Une
grande partie d’entre elles a été réalisée dans le cadre des mestrados de
“Planejamento Urbano e Regional” de Sociologie, d’Anthropologie, donc
avec l’aide financière du gouvernement.
Au cours des années, les études sur le logement ont subi une évolution.
Nous pouvons identifier cinq grands axes de recherches faisant l’objet de
travaux. Chacun sera commenté et analysé selon son stade d’évolution :
• l’étude de la favela
• l’étude de la politique du logement
• l’étude de la croissance périphérique, les lotissements et l’autoconstruction
• les mouvements sociaux liés à la question du logement
• l’histoire sociale du logement
Une telle évolution conserve des liens assez étroits avec la réalité
urbaine et les changements qu’elle a subis, ces vingt dernières années (voir
article précédent). Il existe aussi un lien avec les tendances théoriques,
notamment celles de la sociologie urbaine.
Cahiers du Brésil Contemporain, 1987, n°1
Licia VALLADARES
1. L’ETUDE DE LA FAVELA
Le sujet de la favela a ouvert la voie aux études sur le logement au
Brésil.
Revenons aux années 60-70 : la population urbaine du pays représentait
déjà 56 % de la population totale. Le taux de croissance des villes était de
5,7 %. Dans toutes les grandes cités. La pauvreté grimpait en flèche et les
quartiers populaires (surtout les favelas, mocambos, malocas, etc.)
s’étendaient hors du contrôle des administrations locales et des propriétaires
de terrain.
Ce phénomène, connu aussi dans les autres pays de l’Amérique latine,
avait inspiré la théorie de la marginalité sociale urbaine qui, à partir de la
problématique écologique-physique, trouvait un prolongement dans les
conditions de vie et de travail et dans le comportement politique des pauvres.
La marginalité-exclusion dans l’espace a alors été associée à la marginalitéexclusion sociale.
C’est dans cette optique que les premières études sur les favelas ont été
conduites, à commencer celles de Rio de Janeiro où elles faisaient partie du
décor. Le meilleur exemple en est l’article de Andrew Pearse (1962) publié
en français sous le titre « Quelques caractéristiques de l’urbanisation dans la
ville de Rio de Janeiro ». Cet anthropologue américain a étudié une favela de
Rio dans l’optique des études de communautés, community studies, et en a
dégagé une analyse isolée. Il y suggère que :
• il s’agit d’une communauté avec ses propres normes codes, morale,
d’une véritable enclave rurale dans la ville, d’un monde à part ;
• son image de la favela répond parfaitement bien à la théorie de la
marginalité sociale (anomie, désorganisation familiale, chômage).
Une deuxième étape de l’étude de la favela s’ouvre au milieu des années
60, lorsque des anthropologues, une fois de plus américains, font des
observations-participations dans les favelas, dans le but de tester la théorie de
la marginalité. A. et E. Leeds (1978) A Sociologia do Brasil Urbano, Janice
Perlman (1976) The Myth of Marginality, et tout un groupe de Peace Corps
va montrer un autre visage des favelas de Rio : des quartiers pauvres, pleins
de dynamisme social, à forte économie interne et à haut degré d’organisation
sociale et associative. Leeds, qui va insister sur les social networks (réseaux
de relations sociales) et leur rôle dans la survie quotidienne, commente le
passé urbain des habitants, antérieur à leur vie dans la favela, pour démontrer
Etudes sur le logement
qu’il ne s’agit pas de migrants récents venus directement de la campagne.
P. Silberstein (1969) dans « Favela Living : Personal Solutions to Larger
Problems » montre, à travers l’étude du mode de vie des favelados, qu’il n’y
a pas ici une “culture de la pauvreté”, comme l’avait décrite O. Lewis pour le
Mexique. Selon J. Perlman, rien n’est politiquement à craindre puisque
l’habitant de la favela, bien intégré, a succombé aux valeurs petites
bourgeoises.
La troisième étape de l’étude de la favela, qui se poursuit jusqu’à nos
jours, commence en 1970 lorsque les chercheurs brésiliens s’approprient
l’étude de ce genre de quartier populaire. Des architectes et des sociologues
se sont tournés vers les favelas pour y faire leurs thèses ou pour participer à
différents projets d’intervention, du relogement à la politique actuelle de
récupération et d’installation de services dans la favela. Une énorme
littérature existe déjà et porte sur différents aspects, en particulier ceux de la
favela par rapport à la ville et à la société :
• favela et politique : ce thème comprend la politique dans la favela, ses
transformations et ses liens avec les partis politiques, l’administration
locale et les agences de planification. On a montré comment on est
passé d’une politique clientéliste aux mailles d’une administration
bureaucratique (Eli Diniz, 1983, Voto e Máquina Política). On a étudié
les associations de résidents et leurs rôles, les conflits internes avec
leurs cycles de vie et leurs dépendances par rapport aux politiciens, aux
administrateurs et actuellement à l’église catholique (C. Nelson dos
Santos, 1981, Movimentos Urbanos no Rio de Janeiro) ;
• la stratification à l’intérieur de la favela et sa relation avec le système
de stratification sociale, en général (Machado da Silva, 1967, « A
Política na Favela ») constituent le deuxième aspect abordé ;
• l’intervention de l’Etat dans la favela :
▪ des études ont aussi été faites sur les opérations de relogement mises
en place à la fin des années 60 et au début des années 70. Ces
recherches ont traité des transformations conduisant à une telle
politique et ont décrit le démarrage des opérations, suivies de
réactions des habitants des favelas, de la vie dans les nouveaux
quartiers périphériques et des effets pervers dus au relogement (Licia
Valladares, 1978, le montre dans Passa-se uma Casa) ;
▪ actuellement à la suite d’un changement de politique (servicing
urbanização), la réflexion s’oriente vers de telles expériences.
L’UNICEF, qui a tout un programme d’actions évalue ces plans de
“participation populaire” (Brasileiro et al., 1982, « Extending
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Municipal Services by Building on Local Initiatives”). Les premières
expériences de régularisation du sol et d’accès à la propriété dans les
favelas, deviennent aussi sujet d’étude.
▪ il faut mentionner encore deux nouveaux genres de travaux sur les
favelas de Rio :
- des études basées sur des données statistiques : l’IBGE et l’équipe
de Jane Oliveira (1983) ont travaillé sur des chiffres originaux qui ont
permis de comparer la population des favelas à celle des nonrésidents depuis 1950. L’étude Favelas do Rio de Janeiro a montré
que le taux de “favelisation” commence à diminuer (1950 = 7 % de la
population du municipe de Rio ; 1960 = 10 % ; 1970 = 13 % ; 1980 =
12 %). Cela résulte de trois facteurs : la politique du relogement, la
diminution de la migration vers Rio et des déplacements à l’intérieur
de la métropole -le haut coût de la vie dans la favela renvoie en effet
les gens à la périphérie ;
- des publications sur les favelas faites par les favelados eux-mêmes :
le livre de Manuel Gomes (1980), As lutes do povo do Borel en est un
exemple comme la publication effectuée par l’Association des
Résidents de la Rocinha (1983). Varal de Lembranças.
Nous avons parlé jusqu’ici des études réalisées sur les favelas à Rio, qui,
effectivement l’emportent sur le reste. I1 faut mentionner deux autres villes
où les études sur les favelas commencent à se multiplier :
• à São Paulo, la population des favelas est en pleine croissance, mais
c’est un accroissement plutôt récent (la plupart des pauvres de São
Paulo vivent, soit dans les taudis du centre, les cortiços, soit dans les
lotissements de la périphérie lointaine). La population des favelas
paulistes ne dépasse pas les 3 %. Plusieurs auteurs y travaillent dont
Lucio Kowarick (1980, A Espoliação Urbana) qui démontre que la
favela joue un rôle différent de celui qui lui est normalement attribué :
elle ne constitue pas un tremplin vers une situation meilleure. A São
Paulo, s’installer dans la favela représenterait un processus de filtrage
descendant. Suzana Pasternak (1984) dont la thèse Moradia da
Pobrezà : Habitação sem Saude, se distingue par le fait qu’elle
considère dans leur ensemble les différentes alternatives de logement
des couches populaires ;
• à Recife, Marcus Melo (1985) dans A Cidade dos Mocamboa : Estado,
Habitação e Lutas de Classe no Recife étudie l’intervention faite dans
les années 70. J. Falcao et Boaventura S. Santos (1985) dans Conflito
de Direito de Propriedade ont écrit sur les conflits de propriété qui ont
Etudes sur le logement
eu lieu à Recife entre les années 60 et 80, tout en attirant l’attention sur
un phénomène nouveau : la favelisation par la voie d’invasions
collectives. Ce travail est aussi original puisqu’il montre la différence
entre la justice sociale et la justice légale dans le cadre de la
traditionnelle société brésilienne.
2. L’ETUDE DE LA POLITIQUE DU LOGEMENT
Un deuxième grand axe de recherche correspond à l’étude des politiques
de logement au Brésil, notamment celles mises en place par le régime
autoritaire à partir de 1964 et dont les résultats restent très visibles dans les
grandes villes brésiliennes où les grands ensembles de la BNH (conjuntos
habitacionais) marquent bien le paysage des périphéries.
A partir des années 1970, on a vu un grand nombre de thèses s’intéresser à la
politique de cette Banque Nationale du Logement, responsable en 20 ans
d’une action unique au Brésil de financement de logements pour les classes
moyenne et pauvre et de l’assainissement dans les petites et moyennes villes.
Le pourcentage des habitations urbaines desservies en eau courante est passé
de 42 % en 1960 à 76 % en 1980, grâce à un programme spécial de la BNH,
responsable de la gestion d’un fonds de retraite et de garantie (FGTS) et d’un
système d’épargne et de prêts (SBPE) qui, encore récemment, atteignait un
énorme succès financier.
Les études réalisées sur la politique de la Banque forment un ensemble
cohérent dans la mesure où le point de départ est à peu près le même : la
Banque et sa politique ont émergé d’un contexte de crise politique et
économique, en particulier dans les secteurs du bâtiment et de l’immobilier
très affectés par les taux d’inflation des années 60. La crise s’est traduite en
outre par un manque de dynamisme dans l’industrie du bâtiment, responsable
de l’absorption de vraies “hordes” de main d’oeuvre sans qualification. La
priorité que le nouveau gouvernement allait donner au logement qui n’avait
jusqu’alors occupé qu’une place très secondaire dans la politique sociale, a
aussi été interprétée comme une stratégie politico-idéologique vis-à-vis des
classes urbaines défavorisées : on allait les “récompenser” pour les “méfaits”
commis par le régime autoritaire par l’accès à 1a propriété d’une maison.
Les études, dont les plus connues sont celles de Bollafi (1975, 1977 et
1980), Sergio Azevedo et Luis Aureliano G. de Andrade (1982), Habitação e
Poder ont pratiquement pris le même chemin :
• elles ont mis en évidence que les mécanismes financiers de la Banque
se révélaient très avantageux pour le capital privé et très préjudiciables
Licia VALLADARES
aux classes populaires et moyennes. Le système de l’indexation rendait
en effet les prix inaccessibles ;
• ces analyses ont différencié plusieurs phases de la politique mise en
place par la Banque : la première, plutôt d’organisation et
d’articulation, où un certain accent est mis sur le logement social ; la
deuxième où les financements commencent à concerner directement
les classes moyennes ; la troisième où les investissements amorcent
leur diversification (la Banque finance alors l’assainissement, les
transports, le métro de Rio de Janeiro et de São Paulo, des équipements
collectifs, etc.) ; la quatrième, jusqu’à aujourd’hui, insiste de nouveau
sur le logement social et la multiplicité des politiques “alternatives”
(sites and services, récupération des favelas, aide à l’autoconstruction) ;
• d’autres auteurs ont évalué certains programmes, notamment ceux des
COHABs, compagnies mixtes, contrôlées par les autorités locales
chargées de la construction et de la vente des logements financés par la
Banque. Ces études ont dénoncé la mauvaise qualité des constructions
et ont examiné la question de l’accès et de la distribution des
logements tout en soulignant les mécanismes informels d’achat et de
revente (Licia Valladares, 1978, Passa-se uma Casa). Un processus de
détournement de clientèle a été révélé par plusieurs de ces enquêtes qui
désignent la classe moyenne comme la vraie bénéficiaire du logement
social.
A présent, pour ses programmes “alternatifs”, la Banque propose ellemême des études et les commande même à des centres spécialisés comme
l’IBAM (Instituto Brasileiro de Administração Municipal), l’IUPERJ
(Instituto Universitario de Pesquisas do Rio de Janeiro), l’IPT (Instituto de
Pesquisas Tecnologicas) et la Fondation João Pinheiro. Leurs travaux
mobilisent de grands moyens puisqu’ils se font au niveau national.
Il faut souligner que, malgré le grand nombre d’études déjà conçues, des
thèmes n’ont pas encore été traités dans les recherches, à savoir :
• la production de grands ensembles ;
• la promotion immobilière et ses liens avec le système de la BNH ;
• l’impact de l’action de la BNH sur l’expansion des périphéries
urbaines, la valeur du sol, la spéculation immobilière, la ségrégation
sociale.
Etudes sur le logement
D’autre part, l’absence d’études sur la politique du logement, sous
l’angle d’une politique sociale, se fait sentir car la question de 1’habitat a
toujours souffert d’isolement.
3. LA CROISSANCE PERIPHERIQUE :
LES LOTISSEMENTS ET L’AUTO-CONSTRUCTION
Alors que les chercheurs brésiliens se penchaient sur l’étude de la
favela, ou sur celle de l’intervention publique planifiée nationalement, un
autre phénomène prenait son essor, loin de leur regard : la croissance de la
périphérie des grandes villes, où, de plus en plus, la population pauvre
s’isolait à partir de mécanismes que l’Etat et les administrations locales
contrôlaient peu. Ce phénomène se traduisait par la répartition de grandes
étendues de terre en lotissements souvent petits, vendus par des entrepreneurs
aux couches populaires qui y construisaient leurs propres maisons comme
d’ailleurs dans la favela.
L’expansion de périphéries a commencé dans les années 30 et 40 à Rio
et à São Paulo, mais ce n’est que dans les années 70 que ces banlieues ont
éclaté et ont immédiatement attiré par voies de conséquence, l’attention des
premiers chercheurs, cette fois paulistes, architectes et urbanistes de la USP.
Une fois découverte, la périphérie et les phénomènes de périphérisation
sont vite devenus les sujets privilégiés des chercheurs. Entre 1970 et 1980,
plusieurs thèses ont été écrites sur Rio et São Paulo (Maricato, 1980;
Bonduki et Rolnik, 1979 ; Beozzo, 1980 et Chinelli, 1980). Leurs travaux
présentent un élément commun, un même point de départ, l’idée que ce
phénomène de périphérisation n’est que la projection dans l’espace d’un des
aspects du processus d’accumulation capitaliste. Les pauvres qui sont ainsi
repoussés du centre-ville voient leur devenir plus difficile, étant écartés de
l’urbanisation. Plusieurs facteurs contribuent à ce processus : les salaires des
pauvres, leur expulsion directe du centre provoquée par des programmes de
rénovation, leur expulsion indirecte par le moyen des impôts locaux et de la
spéculation immobilière.
Les études faites à Rio et à São Paulo se sont orientées vers :
- les lotissements : leur statut “irrégulier”, les transgressions aux normes
et aux codes de construction ;
- les lotisseurs, individus et compagnies, leurs relations avec les
administrations locales (mairies), le système de vente des lots, la
stratégie de vente ;
Licia VALLADARES
- le processus d’auto-construction dont le débat est animé par deux
interprétations :
▪ pour C de Oliveira (1972), l’auto-construction représente un travail
non rémunéré et en tant que tel contribue à faire baisser le coût de la
force de travail. De plus, elle fait partie de l’accumulation et y joue un
rôle significatif (l‘Etat s’en lave les mains) ;
▪ pour C. Nelson dos Santos (1980), bien que l’auto-construction
puisse représenter un travail non-payé, son produit (le logement) a une
valeur d’échange ainsi qu’une valeur d’usage. Le logement autoconstruit est un bien qui possède son propre marché de vente et
d’achat. Une énorme spéculation se développe dans les lotissements,
au moment d’y bâtir et d’y installer des lignes de transports, etc.
La polémique s’alimente également de savoir s’il y une vraie autoconstruction où s’il s’agit d’une auto-production de logements. Les études
montrent que le processus de construction de la maison ne se fait pas
exclusivement par la famille et ses amis (mutirão ou entraide) mais qu’en
outre, à des phases précises de la construction comme les fondations, une
main d’oeuvre spécialisée (plombier, maçon...) est rémunérée. D’autre part,
certaines enquêtes montrent que le mutirão se pratique de moins en moins et
que c’est plutôt chaque famille qui s’occupe davantage du processus de
construction.
Dernier aspect du débat : les aspects positifs et négatifs de l’alternative
de l’auto-construction dans la périphérie.
C. Nelson dos Santos trouve que c’est là où les pauvres peuvent le
mieux, actuellement, montrer leur capacité à trouver des solutions et donc
participer au système. Ils peuvent spéculer, exercer leur créativité, développer
de nouvelles pratiques sociales de l’espace.
Beozzo (1980) qui a fait une étude anthropologique dans un lotissement
pauvre où il n’y avait pas de possibilités de spéculation, suggère le contraire :
l’auto-construction équivaut à un coût social énorme : les familles sont
obligées de restreindre leur niveau de consommation. On vend des meubles
pour construire un mur, on retire les enfants de l’école, on change les
habitudes alimentaires. La construction représente finalement un vrai tour de
force. Par ailleurs, le produit final n’est pas des meilleurs : les maisons
restent inachevées et la mauvaise qualité des matériaux prédomine; on réalise
le “rêve de la propriété” en dehors des normes de la BNH mais à un coût
élevé.
Etudes sur le logement
4. ETUDES DES MOUVEMENTS SOCIAUX LIES A LA QUESTION DU LOGEMENT
Elles ont commencé à partir des années 80 et se sont inspirées de
Castells, Lojkine, Borja et aussi de l’épreuve de la réalité. Après la
“abertura”, une énorme mobilisation sociale est née des quartiers pauvres, des
périphéries et des lotissements où les infrastructures urbaines parvenaient
difficilement. Dans les favelas, une tradition associative existait depuis
longtemps.
Parmi les enquêtes menées, se distinguent celles qui regroupent les
mouvements sociaux, liés à la question de la terre sous forme soit de
lotissements clandestins, soit d’occupation irrégulière des favelas et ceux qui
revendiquent l’installation d’équipements collectifs dans ces quartiers
pauvres.
Sur les lotissements clandestins de São Paulo, nous nous référons au
livre São Paulo -Terra de Habitação, Terra de Espoliação (1985) et en
particulier aux articles de Tilman Evers et Paulo Krischke où ces auteurs
montrent comment se mène la lutte des résidents par la négociation avec les
compagnies immobilières et les agences gouvernementales. A Rio de Janeiro,
des études ont été faites sur la MAB, importante fédération d’associations
d’occupants de lotissements. Ce sont les mémoires de maîtrise de Julia
Bernandes (1983), devenue elle-même militante -Espaço e Movimentos
Reivindicatores : o caso de Nova Iguaçu- et de Leda Queiroz (1981) Movimentos Amigos de Bairro de Nova Iguaçu : o Povo pede Passagem.
En ce qui concerne les enquêtes sur les mouvements sociaux qui
revendiquent le développement d’équipements collectifs - hôpitaux, crèches,
écoles, transports, etc. -nous pouvons citer à São Paulo le livre de Maria da
Gloria Gohn (1985), A Força da Periferia et l’article de Pedro Jacobi publié
dans Movimentos Coletivos no Brasil Urbano (1983). Ce livre présente aussi
une série d’exemples qui montrent bien les mobilisations qui se font au Brésil
autour de la question de la terre et des équipements collectifs. Sergio
Pechman (1984) est 1’auteur d’un mémoire de maîtrise sur la FAMERJ
(Fédération des Associations des Résidents de l‘Etat de Rio de Janeiro). Jo
Rezende (1985), lui-même président de la FAMERJ, a illustré l’élan des
mouvements sociaux dans Como se faz a Luta de Bairros.
5. HISTOIRE SOCIALE DU LOGEMENT, PRATIQUES DU LOGEMENT
Il s’agit d’un axe de recherches très récent, dont le développement est lié
à l’intérêt et aux recherches sur l’histoire sociale urbaine qui recouvre en
priorité le cadre de Rio de Janeiro.
Licia VALLADARES
Les origines de l’intervention de l‘Etat sur le logement au XIXe siècle
sont d’abord étudiées à partir de la législation mise en place contre les
cortiços et ensuite à partir de la réforme urbaine de Pereira Passos (19031906). L’habitat populaire commence à être décrit avec la vie collective dans
le centre ville et dans les cortiços. Les conditions d’insalubrité qui ont servi
“d’excuse” à l’intervention publique sont relatées. D’autre part, on se met à
s’intéresser au début de la favelisation à Rio, liée à la réforme urbaine plus
qu’à la migration vers cette métropole. Dans deux séminaires, « Habitação
Popular na Primeira Republica » (Casa de Rui Barbosa et IUPERJ, juin 1984)
et « Rio Republicano » (Casa de Rui Barbasa, octobre 1984) plusieurs
travaux ont été présentés, qui illustrent l’état actuel des recherches (voir
bibliographie).
Un autre type d’habitat populaire, les vilas operárias est aussi examiné.
Les vilas, dans le même style que celui des cités ouvrières européennes du
XIXe siècle, furent construites par les usines pour loger les travailleurs. Ce
phénomène est étudié en détail à Sao Paulo par Eva Blay (1985) dans Eu não
Tenho onde Morar.
Avec les travaux récents sur l’histoire urbaine, le boucle se referme. Les
premières approches sur la question urbaine au Brésil ont considéré la favela
comme un espace isolé et à forte identité ; pour privilégier ensuite l’action de
l’Etat sur l’urbain, le phénomène de “périphérisation”, l’étude des
mouvements sociaux urbains ; pour revenir enfin à la favela en l’étudiant sur
un nouvel angle -non plus en tant qu’espace écarté et fruit des migrations
vers Rio, mais en tant que manifestation de processus plus généraux de
formation et de transformation de l’espace métropolitain dont les débuts
remontent au tournant du siècle.
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