Ce que je vois de ma fenêtre O que eu vejo da

Transcrição

Ce que je vois de ma fenêtre O que eu vejo da
Coordination
Jean Foucault et
Gloria Kirinus
Ce que je vois
de ma fenêtre
O que eu vejo
da minha janela
Photo de couverture
Un comédien à la fenêtre durant le spectacle O homem do banco branco e
a amoreira/ L’homme du banc blanc et le mûrier, très beau spectacle pour
enfants vu à Curitiba en septembre 2012. La représentation du mûrier est à
peine visible ici, mais il est très attirant
J’appelle le mûrier « l’arbre à mûres » car au Brésil c’est un arbre véritable
et non un arbuste comme en France.
Que les poètes n’oublient pas que c’est l’arbre qui permet de nourrir le ver à soie.
Première leçon de langue vivante : l’amoureuse se dit namorada (et vice-versa).
Pièce de Talita Neves e Moira Albuquerque. Nous avons assisté à une
représentation de cette belle pièce au teatro da Esquina/ Théâtre du coin de
la rue (SESC), à Curitiba.
A Fotografia da capa do livro
Um comediante na janela durante o espectáculo : « o homem branco e a amoreira » espectáculo para crianças muito lindo que vimos em Curitiba em setembro 2012. A representação da amoreira é pouco visivel nesta imagem mais ela
é muito linda. Eu chamo a amoreira a árvore de amoras porqué aquí no Brasil a
amoreira é uma arvore e não só um arbusto como na França.
Os poetas não devem esquecer que é esta árvore que nutre o bicho da seda.
Primeira lição de lingua viva : a namorada se diz amoureuse (e vice versa)
Peça de teatro de Talita Neves e Moira Albuquerque. Assistimos uma
representação dessa bonita peça no teatro da Esquina ( SESC) em Curitiba.
Contact, contacto : [email protected]
Présentation
Voici un recueil de textes produits suite à l’appel à
écriture lancé par Jean Foucault et Gloria Kirinus
auprès des poètes de France, de Navarre et du Brésil (plus particulièrement du Paraná).
Nous avons proposé cette démarche début septembre 2012. En décembre 2012 nous sommes heureux
de faire connaître la sélection qui en a résulté.
Nous n’avons pas eu la possibilité pour l’instant de
faire les traductions dans les deux sens : les textes
sont donc soit en français, soit en portugais, selon
la langue dans laquelle ils nous sont parvenus.
Vu de ma fenêtre, O que eu vejo da minha janela se
révèle un très riche déclencheur, comme on pourra
le constater. Certains textes ont été écrits pour la
circonstance, d’autre existaient déjà.
Merci à tous.
Et à une prochaine proposition sans doute !
En tout cas n’hésitez pas à nous envoyer d’autres
écrits sur la fenêtre car la Maison nomade de poésie
en Picardie réalise chaque année en décembre une
opération « Poètes aux fenêtres » et une anthologie
permanente pourrait alimenter des lectures à haute
voix durant cette période.
Si nous en faisions usage dans ce cadre nous vous
tiendrons bien sûr informés.
Nous pensons que les poèmes doivent circuler. Les
projets culturels autour de la poésie en sont l’occasion.
Nous associons Victor Hugo à cette opération avec
un clin d’oeil à une belle fenêtre qui évoque les choses entendues plus que les choses vues. Une fenêtre
ouverte qui permet d’entendre la vie de la rue, du
port, du monde qui nous entoure. Et qui montre qui
oui vraiment les poètes écrivent toujours « de leur
vivant ».
Les poètes de langue française
+ une poétesse Italienne
Les coquelicots
La cohue sanguine des coquelicots avale
l’herbe verte. Le printemps reparait coiffé de
son bonnet rouge. La belle à sa fenêtre reste
maussade : son bonheur est captif des marchands.
La mouche du bourreau pond des billets verts,
mais qu’importe la couleur : le jardin du désert
se gorge de fripouilles.
Avril-mai-juin de chômage : un sein gros de
tiédeur vendra-t-il son reflet ?
La cohue rouge des bonnets phrygiens par
malheur s’agenouille dans la boue du désastre.
Daté du 14 juillet.
Patrick Werstinck
Une image d’œil de bœuf occulté
Vous ne pouvez pas rire dans votre petit théâtre, à vous rencontrer vous-même comme une
image.
Elle ferme les yeux, elle devine d’autres réalités.
C’est toujours ainsi, grave petite âme, vous
vous imaginez attente et éclat, éclatement, rassemblement d’atomes, œcuménisme des matières où s’égoutte la contemplation de vos jours,
vos échanges biologiques, vos minutes, vos secondes.
Percevez-vous vos (les) riches heures de ce 27
septembre 2012 ?
Patrick Werstinck
Par delà l’océan
En ma mémoire, à ma fenêtre, une hirondelle
volète, saute aux pas secrets de ses desseins.
Vers l’Afrique, dit-on, chaque automne l’emporte.
A-t-elle un jour conçu l’audace, oh ! combien folle !
de traverser vers le Brésil tout l’océan ?
Elle est partie de Picardie, cette hirondelle
audacieuse, emplumée d’encre noire fleurie
d’un nénuphar-lotus. Désormais elle vole
au cœur de la cité dite Curibita,
et de leur janela les habitants la voient
de ses ailes bleutées danser une salsa
inattendue, insoupçonnée, allegreto !
Normande d’origine, vivant en Ile de France et peu
sortie de l’hexagone, j’apprécie de pouvoir me baigner
dans d’autres eaux , de contempler les gens, le monde
par des fenêtres ouvertes sous d’autres cieux.
Agnès Gueuret
Une baie sur la baie
Depuis un an des banquiers disparaissent. À
ce rythme-là, tout le système bancaire risque
de s’effondrer. Des extraterrestres feraient des
prélèvements en prévision d’une mondialisation galopante. Ils seraient inquiets. Il faut se
mettre à leur place. Au coin de la rue un type
tend la main chaque fois que quelqu’un passe.
Il s’agirait d’un banquier incognito. Un rêveur.
Il collecterait des fonds pour un paradis fiscal
– un endroit avec une baie vitrée donnant sur
une baie privatisée à l’infini.
Claude Held
Les Tertres, le 27 août 2012
10
De ma fenêtre
De ma fenêtre ce samedi matin, au cœur de la
ville, en ouvrant mes volets, j’ai aperçu un drôle d’habitant dans l’école d’en face. Un lapin
qui s’en donnait à cœur joie et batifolait entre
les massifs de fleurs aux couleurs chatoyantes.
Je le soupçonne d’avoir fait une longue halte
durant la nuit dans le potager des enfants. Pas
si bête ! Le week-end, il ne risquait pas d’être
dérangé. A lui, salades, carottes , radis et autres
gourmandises. Et pour ça, pas besoin de savoir lire les petites pancartes plantées dans les
sillons, il lui suffit de goûter tranquillement à
tous ces mets de roi.
Au loin dans le goulet, un méthanier quitte la
rade de Brest sous un ciel en demi-teintes dans
une indifférence totale. Il a pourtant actionné
sa corne de brume. Chacun mène son petit bonhomme de chemin sans prendre le temps de regarder, d’écouter, de sentir ce qui se passe : la
fraîcheur de l’air, cet homme qui crie dans la
rue, ces goélands qui se disputent sur les toits.
Faut -il être un peu poète pour s’attarder sur
ces choses-là ?
Chantal Couliou,
Brest, le 27 août 2012
11
Vu d’ici
J’habite le passé. Ma fenêtre donne sur une carte
postale, maisons à colombages, couleurs vives
altérées par le temps. Vit-on ici ? Mystère ! On
passe, on trépasse. L’horloge semble-t-il s’est
arrêtée à l’heure du Conquérant* ! L’Abbaye
nous rappelle à sa présence. Je suis dans le périmètre protégé ! Attention ! Ne pas déranger !
Les murs ont des oreilles ! Soyez prudents ! Par
grand vent, les poules ont des dents !
*Guillaume le Conquérant
Beaumont-en-Auge, Calvados, France
Dan Bouchery
12
Réseve
De la fenêtre je parcours le paysage de ton
sommeil
Au clair-obscur un cœur à poings fermés
La persienne tamise un horizon d’île nue
De la fenêtre ma rêverie dérive jusqu’à tes rêves
un sillage veut débarquer
un rayon caresser ton écorce
une rosée rafraîchir ta mémoire nue
De la fenêtre s’éveillent toutes mes persévérances
entre hier et demain une espérance hésite à te
bercer
la persienne en vigie sur ton sommeil pied nu
Daniel Maximin
13
Dans ce grand silence de fin de nuit, l’aube est encore
loin. Aucun signe n’éclaire à l’est au-dessus du lampadaire. Je m’installe. Sur la terrasse. Cahier. Stylo.
Coq. Là-bas. Du côté des cyprès. Sombres torches
immobiles dans la nuit. Grillons d’août. Déjà moins
sonores que ceux de juillet. Rumeur de pénétrante à
gauche. Vers l’Ouest. Juste une rumeur. Cela suffit.
Juste un rappel : d’autres hommes vivent alentour.
Se déplacent. Vont quelque part.
Moi, je suis assis à la table du balcon. Le regard oscillant du cahier au paysage noir. Troué de réverbères. Cabris. Grasse. Et mon lampadaire, fidèle Mon
lampadaire qui nuit après nuit me surveille. M’éclaire. Qui a les moyens de me faire écrire ! Sans lui je
regarderai au-delà des étoiles. Là je dois les chercher
par l’écriture, les allumer à ses encres
Face à moi. A mi-pente. La balafre de la Maison
d’arrêt. A chaque fois que je lève les yeux vers elle,
je revois les couloirs, les portes, les visages d’alors
Les claquements de serrures électroniques.
Patrick Joquel
14
Ce matin, à gauche de la prison, un feu. Il n’était pas là
hier soir. Je l’aurai vu. Orange dans la nuit. Ira-t-il se frotter au mur d’enceinte ?
L’aube. Le ciel devient bleu. A l’est. Tendre comme une
Beau silence du début du jour prêt à recevoir toutes les
empreintes du vivant. La fumée du feu devient visible.
Panache noir sur fond de ciel bleu nuit. La lumière avance vite à présent. La planète tourne sur elle-même à belle
vitesse. Chaque matin me le rappelle. Le temps. L’écriture. Un matin qui en suit tant d’autres.
A Mouans-Sartoux le cri du coq trace la rumeur des moteurs. A Mbodiène son chant traverse celui des pilons.
Même aube et même animal. Les bruits des hommes diffèrent. Leurs vies aussi. Cependant au réveil nos gestes
sont identiques. Regarder le ciel. Uriner. Boire et manger.
Quelques milliers d’années que cela dure et que les vaches nous ruminent sagement.
En ville les feux rouges nous regardent avec la même
placidité tandis que nous écoutons sur notre autoradio un
chroniqueur parler des coqs Elyséens.
Patrick Joquel
15
La vitre dévide le film de pays anonymes. Des gens
vivent à l’intérieur de périmètres définis par leurs
propres parcours.
Clos comme les paupières d’un mort, des volets
cachent des intérieurs autrefois festifs, plongés en
coma artificiel. À d’autres fenêtres, des femmes en
fichu, font le ménage à fond.
Dans un jardin public, une statue rit des impertinences d’enfants irrévérencieux. Des immeubles, au
désespoir de l’architecture, abritent des ouvriers en
sursis, proies des boursicoteurs.
Entre les bourgs, la terre à nu. Qui nous nourrit jusqu’à son refus final devant notre incurie. Des bosquets subsistent. On y range le gibier que des chasseurs fusilleront à l’ouverture. Un cimetière passe,
où restent à quai d’anciens vivants.
Sur un ruban d’asphalte parallèle, des voitures se
courent après, tels des gamins jouant à chat.
Mario Urbanet
TGV Grenoble Paris, le 28 juin 2012
16
Hola tous, voici :
De ma fenêtre-janela, je vois la mare de Plouy Saint-Lucien et oh, surprise, ce matin, une fleur ouverte de nénuphar-lotus. Elle est rose. Le couple de canards se tient tout
près, comme pour poser. En cette fin d’été, de ma janela,
je vois les hirondelles en grand nombre : je regarde leurs
ailes bleutées et imperméables quand elles font plouf
dans l’eau. Je tremble d’en voir une se noyer, mais non,
c’est leur façon d’être, plouf. Grâce à elles, nous n’avons
pas de moustiques en vivant si près d’une mare en Picardie. Comment sont les mares de Curitiba ? Y a-t-il des
hirondelles de janelles ?
J’aime le mot janela, la douceur du j, et la langueur du ela,
à la fin... Là Jean veut que l’on pense à lui, me dis-je, dans
le mot janela il y a Jean.
isabel Asúnsolo
17
de ma fenêtre-janela
à Plouy saint-Lucien
à l’instant
le jour se lève,
la première mésange bleue vient d’arriver sur le filet de
graines.
Elle n’est pas encore bleue
le jour n’est pas encore bleu
mais moi je suis là, elle est là, et le monde tourne rond.
isabel à tous
27 11 12
18
FENÊTRE SUR COU
Un rectangle noir, à guillotine, scellé dans le mur
— de mains de maître.
Une géométrie suspendue au dix-neuvième étage,
par des fils d’araignée dont le réseau serré tapisse
l’immeuble d’une soie d’argent gluante.
Une déchirure de la paroi, à la mesure de l’effroi qui
ouvre grand les lèvres de celle qui regarde par-dessus son balcon, en combinaison ajourée.
Un écran qui s’enfonce dans un écran plus petit,
spectral, d’où émerge le corps un peu transparent
d’un enfant de jadis.
Une issue vertigineuse qui ne laisse pas voir la tête.
Il s’est crevé les yeux, pour fixer au néant sa fenêtre
intérieure.
Son cou sert
de joint d’étanchéité.
Tristan Felix
Paris, le 27 septembre 2012, 15h14
19
De ma fenêtre j’ai vu
étonnement
une biche suivie
de un non deux et non trois faons
qui traversaient la rue
Rêve bucolique
j’étais sous le charme
une beauté animale
s’exprimait
dans leurs mouvements
Quelqu’un derrière moi dit
« Ce sont eux qui mangent mes rosiers »
Un autre enchaîne
« Ils viennent près de nos maisons
ils nous empêchent même de passer »
Un troisième continue
« Quand ils sont trop nombreux
le maire appelle les chasseurs »
Depuis longtemps l’homme
investit les lieux de vie des animaux
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en tous lieux il envahit leur habitat
puis il dénonce leur présence
restreignant leur lieu de vie
Gilbert Desmée
Westlake, USA août 2012
21
Fenêtre sur le monde
L’infini commence derrière ma fenêtre. J’en vois
une infime partie, un fragment composé de quelques
branches qui frissonnent au vent sur fond de ciel de
traîne où les oiseaux font leur travail d’oiseaux et le
soleil sa fantasque partie de saute-mouton.
La fenêtre est un cadre où la lumière s’engouffre.
Pas un tableau statique mais un commencement. La
naissance du monde. Ici n’est qu’un des points sur la
ligne de fuite, toujours démultipliée.
De ma fenêtre je vois le poème s’inscrire en grand
et assez haut pour être vu de tous à des milles à la
ronde. C’est un poème universel que chacun peut
lire depuis sa fenêtre, pour peu d’en laisser germer
librement les mots dans le corps monde des vivants.
Alain Helissen
Sarrebourg, le 27 août 2012.
22
Fenêtre de Nathalie Riera
23
Petite, «mords»
(à nos vains temps / de quel feu naître ?)
Carcasse au bord du gouffre,
un coup d’épaule et : PLOUF !
Epave à bout de souffle /
elle rouille ou dérouille !
Tu meurs ; finie l’esbroufe –
à petit, feu ! – la trouille
est palpable / t’étouffe
et le crié, le tu,
et le cuit et le cru…
Ça craque aux commissures :
dents cariées – Déchausse, hure !
Oh, ces douleurs absurdes
et tes leurres, pas doux ;
Tous les maux que sues, sûr ;
lézardes z’ et fissures…
Où se pendre : à Cordou ?
Où s’éprendre, en corps fou ?
Qui maudire, ô nouille, orque ?
Qu’art casse à Caracas,
empavé chez Godard /
ne pouvant pas t’enfuir,
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tu fuis donc de partout,
et ta «petite mort»
n’est que petite bière :
Honte – à bas ! On t’abat /
au cul, la tabatière…
Quand on fuit de partout,
y a plus d’exil possible,
en Suisse, à Katmandou…
ni paradis fiscaux,
à Cuba ou Bakou !
On FUIT, hein ? Point.
C’est tout.
Jean-Marc Couvé
25
Ma fenêtre de voyage
Dans mon portefeuille, je garde, pliée en quatre,
une fenêtre. Une fenêtre de voyage. Quand je suis
ailleurs, je la sors et l’accroche sur le papier peint
de la chambre d’hôtel, le mur de la chambre d’ami
ou de la salle d’attente. Elle donne sur ce qui m’a
fait lever la tête devant mes fenêtres perdues. Arbres
qui persistent, façades de pierre, toits de tôle. Des
mouettes y passent sur des vagues, toutes sortes de
chats la traversent. Un couple enlacé s’arrête dessous, puis un autre qui se déchire avec des mots, le
même peut-être. Et je collectionne ces centaines de
rectangles de ciel qu’elle découpe dans les bleus, les
gris, tant d’orages ou de nuits.
Constantin Kaïteris
Montreuil Sous-Bois et partout ailleurs,
le 12 octobre 2012
26
Ils sont tous de l’autre côté de la fenêtre à me regarder écrire. Cela se fait chaque été et à la même
place et avec la même lumière, celle qui glisse sur
mon clavier et me donne le sourire. De petits rouges
gorges viennent picorer la vitre pour me dire qu’il est
temps que j’arrête. A la tombée du jour ce sont les
engoulevents qui viennent se fracasser le crane dans
leur hâte de venir boire à ma lampe. Il m’est pénible
d’accepter leur sacrifice. Je sais que les prunes les
attirent. Elles sont veloutées et presque transparentes, chaque jour davantage gorgée de soleil. Je les ai
connu fleurs comme abandonnée sur le rameau, puis
semblables à de petites feuilles se cachant modestement. Et maintenant elles en sont là. C’est un merveilleux privilège que d’ouvrir la fenêtre et d’avoir
des gorgées de sucre et de miel. Et je suis presque
certain : chaque année cela recommence.
Michel Cosem
(Le Fenoul/ Quercy/Lot)
27
La fenêtre de la paix
J’ai vu de mes yeux vu
Dans une seule fenêtre ouverte
Et bien ouverte et bien sonore :
La mosquée de Curitiba
Et des Indiens à plumes
Qui chantent et dansent !
Les Dieux qui se croient uniques
et ceux qui se suffisent polythéistes
Ceux qui croient au ciel
Et ceux à qui suffit la terre
Tous tous les dieux
Partageant un instant
Le chimarão de la paix
Et se donnent la main.
Les Indiens et la mosquée
Les sourates et les Guarani
Tous s’honorent de s’honorer.
Je n’ai pas envie de refermer ma fenêtre
Jean Foucault
(fenêtre du 2 septembre 2012,
praça João Cândido à Curitiba, Brésil)
28
Campement de Roms vu d’une fenêtre
En face, sur le terre-plein, de l’autre côté du trottoir,
on évacue un campement de Roms : cortège de bulldozers. Vêtements, casseroles, matelas... à l’abandon. Cris, jurons, pleurs. Enfants en déroute. Des
tout-petits s’accrochent à leur mère. Déploiement
disproportionné de forces face à cette « poussière de
peuple » : 0,023% de la population nationale.
Des hommes en uniforme s’activent... CONTRE
les Roms ? Non, vous n’y êtes pas. C’est pour leur
plus grand bien qu’on les chasse : pour les « protéger
de l’insalubrité ». Cela dans la plus totale absence
d’un emplacement possible où les reloger plus de
trois jours.
Jacqueline Held, le 31 août 2012
29
Dalla mia finestra perdo parole dalla mia finestra vi
è quel movimento ciò che va ciò che viene nel punto
in cui ciascuno depone qualcosa dalla mia finestra
vi è che la neve potrebbe cadere qui ora nel momento stesso il cui scrivo la parola neve le mie dita
potrebbero farsi spazio nel bianco direi mio dio sono
io quel bianco dalla mia finestra così notturna è la
strada che nasconde il ventre del silenzio da qui arriva la cenere attraverso il vetro chiunque la vede da
qui talvolta t’incontro e s’un verbo muoio sì muoio
senza maschera fai tu la diagnosi se credi
Viviane Ciampi
30
[Traduction de l’italien par l’auteur]
De ma fenêtre je perds des mots de ma fenêtre il y a
ce mouvement ce qui va ce qui vient à l’endroit où
chacun dépose quelque chose de ma fenêtre il y a
que la neige pourrait tomber ici maintenant au moment même où j’écris le mot neige mes doigts pourraient se créer un espace dans le blanc je dirais mon
dieu c’est moi ce blanc de ma fenêtre si nocturne est
la rue qu’elle cache le ventre du silence d’ici arrive
la cendre à travers la vitre quiconque peut la voir
d’ici parfois je te rencontre sur un verbe je meurs
oui je meurs sans masque fais le diagnostic si cela
te chante
Viviane Ciampi
31
32
Textes en portugais
réalisés
par les poètes brésiliens
33
34
Apresentação
Gloria Kirinus
Tive um caso em inglês com a palavra « janela »,
ainda no tempo dos bancos escolares, lá em Lima/
Peru. Pois, então, na aula de inglês eu deveria escrever « o que eu vejo pela janela ». Escrevi imediatamente : I see de wind through the window.
- Errado, errado...!, falou a professora chamada de
« miss » pelos alunos. Vi minha frase voar janela
afora. Conforme a tal « miss » eu deveria ter escrito
assim : I see de bank through the window, porque
o vento não pode ser visto, ele é invisível, segundo
ela.
Claro que eu encontrava uma fraterna visibilidade
entre as palavras « wind » e « window » , assim
como entre « viento » e « ventana ».
35
É preciso que eu conte este recorte do meu caso
de desamor antigo com « janelas» para compreenderem o motivo pelo qual aceitei imediatamente
a proposta de coordenar este projeto « o que vejo
pela janela » com o Jean Foucault.
E as janelas de vocês foram chegando amorosas,
em português, minha língua literária. Tempo de janelas recuperadas da prisão formatada na palavra
« banco » exigida pela antiga « miss », dos anos
escolares.
Recebi novas janelas ampliadas, plenas de vida,
movimento e cor, como as tais amoras que se desprendem do verbo namorar.
36
Photo : Cláudia Helena Daher
(voir pages 38 et 39)
37
Belledonne
Uma cadeia de montanhas cujo topo branco
de neve me leva a sonhar. Poderia eu imaginar
que esta seria um dia a visão da minha janela?
A busca de novos conhecimentos trouxe-me
à França, ao pé dos Alpes. Da minha janela
já não escuto o sabiá... nem o bem-te-vi, nem
o quero-quero. A lembrança da terra natal
desperta uma pontada de saudade. Mas olho
novamente a paisagem recompensadora. Um
mundo novo descortina-se : experiências e
descobertas que ficarão guardadas para sempre.
Cláudia Helena Daher
Grenoble, 28 de agosto de 2012
38
Traduction par l’auteur
Belledonne
Une chaîne de montagnes dont le sommet tout
blanc de neige me pousse à rêver. Pourrais-je
un jour imaginer que j’aurais telle vision depuis
ma fenêtre ? La quête des nouvelles connaissances m’a amené en France, au pied des Alpes. De ma fenêtre je n’entends plus le sabiá...
ni le bem-te-vi, ni le quero-quero. Le souvenir
de ma terre natale suscite une pointe de nostalgie. Mais je regarde le beau paysage encore une
fois. Un nouveau monde s’ouvre devant moi:
des expériences et des découvertes qui seront
gardées à toujours.
Grenoble, le 28 août 2012
De minha janela
Cláudia Helena Daher
39
Depois da queda
Ali, naquela cama de pronto socorro do hospital,
enquanto espero, penso na vida e conto o tempo decorrido. O cálculo está certo uma vez que eu nasci
no dia 1 de abril, à uma hora da manhã, conforme
depoimento do meu pai, no cartório. Meu pai, correto, honesto, que não estava aí para mentir, ou
seja, me deixar nascer no dia 31 de março em vez
de no dia da mentira (como insinuou o tipo que fez
o meu mapa astral, duvidando da minha data de
entrada no mundo). O ano? Algum tempo antes da
Guerra, a Segunda. Uma vida. Já vivi tudo isso?
E agora?
Agora, era agüentar as conseqüências da minha
pressa e precipitação, refletir sobre as recomendações da minha mãe: “devagar, que eu tenho
pressa”, “você é muito precipitada”. Precipitar-se
é “jogar-se de cima para baixo, despenhar-se, lançar-se”. É. Foi isso que aconteceu. Eu me joguei,
ou me jogaram? Como iriam me jogar se eu estava
sozinha em casa? Falácias (adoro essa palavra), ou
desculpas desavergonhadas.
Maria Theresa Brito de Lacerda
40
Photo Maria Theresa Brito de Lacerda
(voir pages 42-43)
Maison familiale de Lapa
41
Um olhar para o passao
Uma casa-Museu... Após tantos anos, como as
suas paredes, os seus objetos, teriam reagido às
transformações de uma simples casa – abrigo
de família – em instituição oficial? Absorveram
as vozes estranhas que vieram substituir os sons
do cotidiano?
E os antigos moradores, como se sentem visitando a casa que fez parte da sua vida em um
passado próximo e que, em um passado longínquo integrava o dia a dia dos seus ancestrais?
O que acontece quando um deles, anônimo e
emocionado, entra pelo corredor, o olhar perdido buscando a paisagem do “Alto da Lapa”?
Talvez consulte as horas no relógio de pêndulo
e, momentaneamente, hesite entre seguir à direita ou à esquerda.
Talvez neste momento, queira desembaraçarse da bagagem, escolher um quarto, uma cama
para logo integrar-se ao movimento da casa.
42
Talvez queira tomar um banho com a água
aquecida pela serpentina do fogão à lenha para,
depois juntar-se à família que estará tomando a
fresca na calçada, no fim da tarde, E, chegando
a noite, as lembranças da infância, da juventude
da maturidade se confundindo, antes de fechar
as pesadas janelas de madeira, olhará o céu,
procurará as estrelas (qual delas vai piscar ou
cair?), ouvirá o murmúrio do vento e o farfalhar
das copas das árvores. Depois, deitado sob o
acolchoado de penas de ganso, abrirá um livro
e vai ler até que o sono venha manso e sorrateiro como a lua quando se mostra no céu, na
primeira noite da cheia
Maria Theresa Brito de Lacerda
43
Olhando pela janela certa
Nem todos os dias o sol nascente doura a paisagem. Neste momento ele o faz e seu calor crescente põe fim à vertente da tristeza que na noite
transformou-se em lágrima. Parece que estou olhando as coisas pela janela certa, como enuncia o
provérbio africano.
Vejo as portas de saída da cidade e percebo os nossos
trajetos num misto de superposição e descompasso.
No meu mapa mental estão os locais e os momentos
em que eu pronunciei palavras ásperas, azedas ou
amargas e expressei no semblante o mesmo dissabor. Há os pontos em que ouvi algo em tom semelhante e provei de um gosto parecido.
Nesta hora de nitidez, desejo muito mais marcar e
vincar nessa cartografia lugares e ritmos de sucessiva aproximação e entendimento. Assinalar pontos
para os quais olhamos juntos, com os olhares justapostos como se vislumbrassem horizontes comuns.
No entanto há uma fenda, uma fissura, nessa paisagem. E, de algum modo, dói olhar para ela.
44
Alex Ratts,
Goiânia, Brasil. 02/06/2005
Na janela do facebook olho as oferendas de
alegria, carinho e fantasias. Muitos pedem, sem
saber, reconhecimento existencial. Da janela da
sala vejo um mendigo caminhando. Um dia ele
também quis reconhecimento. Hoje, só a anestesia do dia.
Segue invisível para a narcísica rede social. Está
literalmente offline! Nem vê a poesia na gota
do orvalho que cai ou no balanço das folhas ao
redor. É um fantasma que arrasta o esqueleto.
Ele se esvai na noite e esvazia o meu olhar.
RozeMeire dos Reis
Curitiba, 16 de setembro, bairro Parolim.
45
O que eu vejo da minha janela
Mudanças na estação
eu vejo a muralha de novos tijolos,
que esconde a serra e as paineiras da praça.
paisagens que murcham com o piscar da rotina.
para sempre. minuto semana cimento orquídea.
andaime outubro crassula guindaste.
um dia após o outro, ao andar dos andares.
imagens que migram para o interior da retina,
mas nuvens transatlânticas aportam nas alturas
abstratas, majestosas, inspiradas pelo vento,
enquanto árvores soletram andorinhas.
Jane Sprenger Bodnar
Curitiba, Alameda Dr. Muricy,
46
cozinha, 11º andar ( 09/10/2012
O reflexo.
Pela janela vejo outras janelas. Luzes acesas dividem a insônia. No que pensam os acordados?
Sofrem como eu ou fogem para a TV? Enquanto reflito nisso me lembro dela e depois delas. É
tanta confusão que prefiro olhar a janela. Pena
que seja impossível não ver meu reflexo.
Fabiano Wunder
Da janela do meu quarto, madrugada, Curitiba,
27/08/2012
47
Outra noite
Meu olhar se perde pela janela em outra noite
nublada sem estrelas. Mais uma noite que não
vai passar. Outra madrugada pensando no que
passou. Noite maldita para lembrar. De que
adianta observar o horizonte distante se ainda
a vejo aqui ao meu lado. Sinto seu cheiro, escuto sua respiração. Pressiono seu corpo. Outra
noite para lembrar e desejar esquecer que ainda
desejo você.
Fabiano Wunder
(Durante a noite,
da janela de meu apartamento, Curitiba,
27/08/2012)
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Calcinha Rosinha
1
caiu do céu
a calcinha de florzinha
rosinha
caiu e ficou
fincada nas farpas
do arame
balangando ao vento
aos olhos dos vizinhos
velhos com seus velhos olhos
sem saber a dona
2
caiu a calcinha rosinha
estranho ninho
assustando os passarinhos
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3
balanga pra lá
as florzinhas
rosinhas
balanga pra cá
sem dona
a calcinha
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4
a chuva molha
o vento lambe
a poeira emporcalha
as bitucas furam
a calcinha
que resiste
... não mais inocente
Joba Tridente: 24.10.2012 - 24.11.2012
http://falasaoacaso.blogspot.com.br/2012/11/jobatridente-calcinha-rosinha.html
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Janelas Encantadas I
Namoradeiras espiam-me da janela... Não sei se
olho a janela ou ela é que me olha num recorte infinito...Tecidos, bonecas, olhares coloridos, tapetes
florais... tudo a janela abriga num quadro, entre
prismas, fuxicos, rendas, crochês. Janelas brancas e
azuis... janelas vermelhas. As janelas passavam por
mim ou eu por elas? Janelas multiplicadas, janelas
livres! Jamais aprisionadas por muros. Uma janela
encantada... sua paisagem é cortina florida, é floreira floral entreaberta por entre os ramos. Tintas e
Tecidos pintam as Janelas de Pirenópolis.
(Ensaio poético-fotográfico : Janelas Encatadas série janelas antigas - Goiânia, 12 de setembro de
2012, fotografias de Givaldo Corcinio Junior)
Valria Cristina Pereira da Silva
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Janelas Encantadas II
Vi da minha janela uma janela ancestral. Nela,
minha avó, que já partiu, tecia pontas de toalha
como ela sempre fazia. Da janela vi todos os anos
que vivi e aqueles que viveram os que vieram antes de mim. Uma janela para o tempo, uma janela
vista do lado de fora da casa! Minha janela interior
e todas as janelas do interior das cidades antigas. A
cidade inteira são janelas sorrindo. Janelas da Cidade de Goiás! Todas as janelas, cheias de jasmins,
jamais esgotadas! Da minha alma é que olho... vejo
janelas encantadas.
(Ensaio poético-fotográfico : Janelas Encatadas série janelas antigas - Goiânia, 12 de setembro de
2012, fotografias de Givaldo Corcinio Junior)
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Visão
Da minha janela vejo um muro branco. Nele vejo
o que não quero ver e nele vejo o que quero. Vejo
traços, vejo tempo, temo o tempo. Vejo riscos,
vejo claro. Vejo notas, vejo som, escuto. Vejo
marcas, vejo - almejo.
Edith de Camargo
(da minha janela, Curitiba,
noite de 02.09.2012)
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Contribution exceptionnelle
de
Victor Hugo
Nous emerrcions vivement le poète d’avoir bien
voulu participer à cette opération en attirant notre
attention sur cette fenêtre, faite de tant de choses
entendues !
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Le matin - En dormant
J’entends des voix. Lueurs à travers ma paupière.
Une cloche est en branle à l’église Saint-Pierre.
Cris des baigneurs. Plus près ! plus loin ! non, par
ici !
Non, par là ! Les oiseaux gazouillent, Jeanne aussi.
Georges l’appelle. Chant des coqs. Une truelle
Racle un toit. Des chevaux passent dans la ruelle.
Grincement d’une faux qui coupe le gazon.
Chocs. Rumeurs. Des couvreurs marchent sur la
maison.
Bruits du port. Sifflement des machines chauffées.
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Musique militaire arrivant par bouffées.
Brouhaha sur le quai. Voix françaises. Merci.
Bonjour. Adieu. Sans doute il est tard, car voici
Que vient tout près de moi chanter mon rougegorge.
Vacarme de marteaux lointains dans une forge.
L’eau clapote. On entend haleter un steamer.
Une mouche entre. Souffle immense de la mer.
Victor Hugo
Ce poème est un extrait de L’Art d’être grandpère, paru en 1877. Il fugrue dans une section
intitulée « Fenêtres ouvertes ». Victor Hugo
est alors à Guernesey.
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Fascículo que foi finalisado em dezembro 2012
em Curitiba (Paraná) Brasil
Acabou de ser escrito um dia de calor intenso, a janela
aberta, e invadido pelos barulhos do mundo
(Curitiba, centro, rua Comendador Araújo)
Fascicule mis en forme en décembre 2012
à Curitiba (Paraná), au Brésil.
Achevé d’écriture sous forte chaleur,
fenêtre ouverte, envahi par les bruits du monde
(Curitiba, Centro, rue Comendador Araújo)
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